Love is a smoke raised with the fume of sighs : Ecriture

par | 24 Avr 2017 | # Parfois j'écris ..., Atelier d’écriture, Un endroit pour ... | 103 commentaires

© Felix Russell-Saw

J’étais le bourlingueur, le sans attache. On me nommait l’Arlésienne, le courant d’air. Jamais réussi à me fixer. Un homme funambule, à naviguer en air trouble. Jamais je ne restais trop longtemps. Une belle péniche sans amarres, ni capitaine. Je voyais défiler sur le bas côté moult paysages. Parfois je m’y arrêtais. Pas trop longtemps. Des objets aux couleurs pastel et en ombres chinoises. Jamais je n’étais retenu.

Et puis hier soir, en regardant le coucher de soleil, une petite main est venue me taper sur mon épaule gauche. Je me suis retourné, j’y ai vu un autre soleil. Et ces yeux me promettaient de ne plus avoir peur du passé. Alors je l’ai suivi, nous avons nous aussi bourlingué, mais sur mes propres pas. Ce que j’avais déjà fait et que je voulais jadis oublier. J’y ai vu des souvenirs aux couleurs criardes rouge sang. Ma main a alors frémi et a serré la plus petite. Mais celle-ci, loin de se démonter m’a demandé de poser d’autres yeux sur ces couleurs, de les comprendre, puis d’oublier.
Alors l’adulte que je suis a vu et a compris.

La vérité n’est jamais unique, elle est à tiroirs. Mais le plus joli d’entre eux (et le plus profond) s’appelle la simplicité d’aimer.

© Alexandra K., dimanche 23 avril 2017

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Ludo :

S’éloigner du monde

Pour ne plus les entendre
Une porte sur le silence.
Face à la noirceur
S’ouvrir à la lumière,
Le monde est trop petit.

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Claude :

« Descends ! Ils viendront te chercher dans deux heures ! Tu es libre… ».

Libre ! Quel sens a ce mot dans la tête de mes ravisseurs ? Voilà sept cent quarante cinq jours qu’un groupe venu de la colline, masqué, armé jusqu’aux dents, a abattu mon chauffeur et m’a emmené, je ne sais où loin du village, dans un coin de cet immense pays. Un temps immensément long passé dans seulement quelques mètres carrés au milieu de nulle part.

Ce matin, trois hommes m’ont débarqué d’un 4×4, sans ménagement, et déposé là, comme un sac de livraison.

A l’ombre d’un grand arbre, seul dans un silence pesant entrecoupé de cris d’animaux, j’attends. Je suis fatigué, amaigri, un peu ankylosé à cause de la couverture dans laquelle on m’avait camouflé, et mes yeux sont passablement éblouis par le soleil intense qui règne déjà à cette heure. De multiples sentiments d’espoir et de découragement m’envahissent. J’ai pensé mille fois à ce moment possible de libération, mais confronté à la réalité, tout me semble aujourd’hui étrange.

Alors, comme tant de fois pendant ma détention, je me replonge dans un passé à la fois proche et lointain. Je me vois encore, aventurier sans illusion, Corto Maltese de circonstance, débarquer dans cette bourgade de brousse pour ma mission humanitaire. Je découvrais le monde. Au fil du temps, des liens forts se sont créés, et j’ai reçu de ce village l’amitié et la sagesse de gens simples. Ils m’ont offert ce que je cherchais : un sens à la vie.

Et puis il y a eu, un soir d’avril, mon enlèvement par ces inconnus. Tout a basculé. En un instant, je suis devenu une monnaie d’échange, une valeur marchande, un objet de troc contre de l’argent, des armes ou un accord politique : une chose de guerre.

Dans les heures à venir, je vais peut-être retrouver mon pays. Des officiels vont m’attendre, se perdre dans des discours ; la DGSE va m’interroger, les journalistes vont me questionner ; je remercierai les comités de soutien au milieu de mes portraits affichés. Et je retrouverai les miens pour lesquels probablement deux ans d’attente, mais surtout deux ans d’existence seront passés. Il me faudra reconstituer sans illusion quelques morceaux du film. Il n’y a pas d’arrêt sur image dans la vraie vie.

Je suis devenu pour longtemps, peut-être pour toujours, l’ex-otage, celui qui  a pris des risques inutiles, celui qui a coûté cher, qui a mis en péril des vies… Les valeurs que je m’étais construit peu à peu au hasard de mes rencontres paraissent s’effriter. La violence se tapit toujours derrière la générosité.

J’ai tout à coup envie de courir, courir comme un fou dans la savane pour rejoindre le village et retrouver la sérénité du partage.

Mais j’entends un bruit ; celui d’un hélicoptère. Des échelles tombent, des hommes lourdement armés en treillis descendent et m’embarquent sans un mot. A bord, un officier me regarde en souriant. « Alors, heureux d’être libre ? ».

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Manue :

J’ai vu des lieux où

le premier jour du monde

semble se lever

Et ses yeux se fermèrent. Ce furent ces derniers mots après des semaines de fureur. Elle était déjà revenue de l’enfer une fois, les médecins appellent ça une réanimation, moi je n’y croyais pas, elle avait une dernière chose à me raconter plutôt, et sa volonté avait fait le reste.

Ses lèvres ne murmureront jamais plus au creux de mon oreille les histoires merveilleuses qu’elle me chuchotait, le soir, celles qu’elle n’écrivait pas aux autres mais juste pour moi, l’homme qui partageait sa vie depuis ces dernières années.

Elle avait rêvé me dit-elle en revenant à elle dans sa chambre d’hôpital d’endroits étonnants où les respirations duraient si longtemps que les êtres humains prenaient le temps de sentir le soleil leur apporter sa force, où les minutes s’écoulaient si lentement que chacun finalement trouvait les mots pour dire à l’autre ses peines, ses doutes et ses colères. Elle avait vu des lieux où tout recommençait chaque matin, des lieux où le soir, la nuit effaçait tout. La mort se nourrissait de la vie mais la vie, prenant la mort de vitesse, redonnait un souffle aux êtres qui s’éteignaient et le même jour se levait, inexorablement.

Elle avait sans doute rêvé me dit-elle. Un tel monde n’existe pas. Et puis elle était morte. Au milieu de la nuit. Bien sûr que ça n’était que son imagination et sa passion de vivre qui avaient parlé … et alors qu’elle n’était plus qu’une enveloppe sans âme, quand le soleil entra dans sa chambre, ses rayons ne purent rien pour elle.

Depuis, je ne peux pas rester plus de vingt-quatre heures au même endroit. Il faut que chaque matin je me réveille ailleurs. Il faut que mes yeux s’ouvrent, appelés par la lumière naissante, sur un monde nouveau, vierge, comme au premier jour. Je conduis la nuit, jusqu’à l’épuisement, et puis je me couche à l’arrière du 4×4 devenu ma maison. Et quand je pousse la portière, c’est en pensant à elle. A ses mots qui dansent encore dans ma tête. Elle, qui n’est plus alors qu’un nouveau jour qui se lève.

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Jos : Ecrire avec la lumière

La main posée sur la poignée de la portière de sa Land Rover, Félix admira la vue qui s’étalait devant lui en toute simplicité. C’était un aventurier, un artiste qui se sentait libre, qui aimait la solitude mais qui voulait toucher les gens à travers son œuvre. Son art était une manière de vivre, une façon de voir les paysages et d’aller vers les hommes, sans parti-pris.

Arrivé la nuit même, il n’avait pu qu’imaginer les reliefs et la beauté de l’endroit. Excité par la perspective du lendemain et impatient de voir se lever le jour, il avait eu du mal à trouver le sommeil. Pourtant, il se réveilla de bonne heure et se prépara avec hâte et détermination.

A chaque expédition, c’était le moment qu’il préférait. Celui de la rencontre avec les lieux. Et ce matin encore, cet instant magique et exaltant que lui procura la découverte du site qu’il allait arpenter pendant des heures pour réaliser sa passion, le remplit de bonheur. Il s’imagina jouer avec la pierre angulaire de son art : la lumière, cette fabuleuse énergie qui mettait la couleur en mouvement. Il en utiliserait les variations infinies pour donner un résultat différent à la même prise de vue. Il en capterait les tons froids et bleutés proposés à l’aube, les couleurs neutres offertes à la mi-journée, les nuances orangées révélées au crépuscule.

La magie du moment ayant fait son effet, Félix s’empara de son appareil et descendit de la voiture.

Il sourit. Convaincu que son art ne se résumait pas à figer un paysage sur des clichés, il partait peindre avec la lumière, écrire avec le soleil et offrir son œuvre aux amoureux de la photographie.

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Nady :

LA LIBERTE

Partir, tout quitter,
S’enfuir ? Tout laisser…
Passer du rêve à la réalité,
Ou vouloir simplement se protéger,
Cela n’a pas été aisé,
Mais je l’ai fait…
Aujourd’hui, je suis apaisé.

Sur les routes depuis quelques années,
Je découvre le monde à bord de mon van démodé,
Travaillant entre deux trajets
à partir de mon site web qui connait plein de succès…
Et dire que j’entends certains politiques effrayés
De l’importance de plus en plus inconsidérée
Que prend le numérique dans nos vies agitées.
Moi, il m’a redonné accès
A la Liberté !

Il m’a fallu du temps pour me faire à l’idée
De tout abandonner.
Il y a eu le départ précipité de Jérôme il y a quelques années
qui a préféré partir pour soigner
son burn out déclaré.
Puis, ce fut au tour de Pierre, aujourd’hui décédé,
Qui préparait déjà son statut de retraité,
Malgré les 10 ans qui lui restaient encore à effectuer,
Qu’une crise cardiaque a rattrapé.
C’est quand je n’ai pas vu Nathalie arriver
A son bureau en cette matinée
De mars pleine de giboulées,
Partie en pleine nuit suite à un AVC,
Que je n’ai plus hésité
à tout lâcher…

Bien sûr, il y avait pitchoune à élever,
Mais ce n’était plus un bébé,
Et sa mère sait très bien s’en occuper.
Entre elle et moi, notre relation tanguait
Déjà depuis l’an passé.
Mais soyez rassurés,
Il peut m’appeler
Ou sur la toile me visionner
Et souvent il nous arrive de beaucoup parler.
Et puis, je le vois chaque été,
Et nous passons des moments partagés
Pleins de sérénité.

Il retrouve pendant un mois un papa plus du tout stressé.
Même si je n’ai plus le temps d’arpenter
Les allées des grands magasins stylés,
Ni ma barbe tailler
Chez le plus chic barbier,
Je lui offre une parenthèse de vie très gaie
Dans des campagnes bien isolées.
Une vie avec un quotidien simplifié
Que j’aime à retrouver.
Je change de destinations quand l’envie pointe le bout de son nez.
Je profite d’ailleurs de pouvoir encore beaucoup voyager
Dans des zones en sécurité
Avant que toutes les frontières de notre monde ne se ferment à jamais.
Tiens, regardez le temps qu’il fait ici ce matin embrumé,
Vais décider de descendre vers le sud moins menacé
Par cet orage annoncé.

Voilà donc ma vie à travers un cliché,
Un besoin de fuir la routine, les chaînes, un quotidien trop balisé.
Telle est ma volonté
De Liberté,
Sans faux-semblants et pleine de fierté.

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Sarahvage :

Tanguy’nto the wild

8 ème jour

Toujours pas de trace de la civilisation, donc toujours pas de carburant. Il fait moche. Cette nuit j’ai tellement eu froid que j’ai cru que mes crottes de nez avaient gelées. Il ne me reste plus qu’un paquet de pâtes au blé complet et 20 litres d’eau. Vu le temps, je vais devoir entamer mes réserves de gaz ; j’aurais dû faire un stock de bois et le mettre au sec sous le camion ou dans la cabine.

J’ai essayé d’appeler ma mère pour son anniversaire hier soir : toujours pas de réseau ! S’il continue de pleuvoir comme ça les prochains jours, je sens que je vais péter les plombs ! Je me suis surpris ce matin à parler aux araignées dans le camion et à attendre une réponse de leur part… Je vais essayer de me rendormir, c’est ce qu’il y a de mieux à faire.

J’ai dormi 2 heures. J’ai faim. Je crois qu’ un paquet de gâteaux doit traîner dans la boîte à gants. Je vais le chercher.

Les clefs du camion ont disparu ! Je les avais laissées sur la porte avant, j’en suis absolument certain ! Deux possibilités : soit, j’aurais déjà perdu la boule, soit un petit farceur me joue un tour.

J’ai pleuré. Ça m’a fait du bien. Je vais retourner toutes mes affaires pour essayer de les retrouver.

Je ne les ai pas retrouvées, j’ai froid et je re très très très faim. J’vais prendre des selfies bidons avec mon portable, ça m’occupera.

Mode avion à la con ! Le réseau fonctionne bel et bien, j’avais juste omis de désactiver le mode avion. Cette aventure de l’extrême en solitaire m’aura fait comprendre que je suis une vraie quiche ! Trente piges et pas fichu de me débrouiller. Enfin si, j’me débrouille, mais mal. C’est ce que ma mère me répète tout le temps. Tiens, d’ailleurs, c’est elle qui m’appelle.

« Allo, m’man ? »

– Bon, t’as fini tes conneries là ?

– Quoi ? Tu peux pas me laisser tranquille, non ?

– Tu seras tranquille quand tu seras chez toi !

– Tu vois, c’est pour ça que je suis parti.

– T’iras plus loin la prochaine fois …

– T’es méchante, comme toujours !

– Peut-être mais en attendant, j’suis ta mère et j’suis chez moi ! Alors, arrête de piquer dans les réserves de pâtes et de riz, viens prendre une douche, viens manger et arrête de parler aux araignées ! Into The Wild dans le garage, t’as pas trouvé mieux ?»

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Adèle : 

Adam et Eve, le péché originel

Cette photo, vois-tu, même si on n’aperçoit pas grand-chose du paysage qui l’entoure, je peux te dire avec précision où et quand elle a été prise. C’est moi qui était derrière l’objectif, un appareil bon marché acheté avec les quelques sous qui me restaient avant de partir pour notre long périple en Europe de l’Est. J’étais assise en tailleur sur le matelas,  à l’intérieur de ce van, tu sais, ce fameux van dont je t’ai déjà parlé, vieux mais encore vaillant, qui avait attiré mon attention la première fois que je l’avais vu, bien plus d’ailleurs que Jim lui-même, son propriétaire.

C’était l’année soixante-seize, je venais de passer mon bac, et tout ce qui ressemblait à la liberté me semblait merveilleux. Je ne savais pas encore que suivre des yeux ce van et son conducteur allait m’entrainer, après quelques mois d’errance idyllique, vers deux années de vrai calvaire.

Jim, avec sa chemise à carreaux et ses petites lunettes à la John Lennon, son accent d’outre-océan et son van pittoresque, avait tout pour me séduire. A cette époque, j’ignorais encore que les plus belles coquilles ne contenaient parfois qu’un œuf pourri.

La veille de cette photo, nous avions roulé toute la nuit, en suivant une vieille carte routière et les indications de copains connus au hasard des campements, des gens qui faisaient la route, comme nous, des garçons, et des filles aussi, qu’on prenait souvent en auto-stop. Le stop était un moyen de voyager commode et peu onéreux, l’état d’esprit était différent, nous n’avions pas ce sentiment de défiance permanent vis-à-vis des autres qui caractérise l’époque actuelle. Les soirées autour du feu de camp étaient joyeuses, bière et guitare, joints et mots doux. On devenait amis, on se quittait au petit matin, et comme il n’y avait pas de téléphone portable, on faisait confiance au hasard pour se retrouver un peu plus tard, un peu plus loin. En aout, nous traverserions la Yougoslavie, en septembre peut-être serions-nous du côté de Varsovie.  Nous avions le temps pour nous et le monde à découvrir. Avant-hier je le regardais dans mon livre de géographie, et maintenant il s’offrait tout entier, à mon regard avide de le toucher, le sentir, le palper. Avec le bras de Jim passé autour de mes épaules, je me sentais en sécurité. Pauvre innocence de la jeune fille tombée du nid !

La photo, je l’ai prise au petit matin, nous étions arrivés au lac Balafon tard la veille, à près de minuit. Par d’autres voyageurs, nous avions appris que les berges étaient accueillantes, on pourrait garer le van au bord de l’eau, un camping tolérait quelques passages aux douches, une ferme vendait œufs, fromages et lait pour trois fois rien.  A proximité, des vergers s’offraient à un chapardage prudent et discret. Je ne me souviens pas avoir mangé d’aussi bonnes pêches que cet été là, mûres à point, elles étaient succulentes, et leur jus me dégoulinait sur le menton et rendait mes doigts tout poisseux.

Les fenêtres du van étaient mal obturées par un rideau trop petit et la lumière du jour nous avait réveillés dès l’aube. Jim avait dormi tout habillé en raison de la fatigue et de la fraicheur de la nuit. Au réveil, il avait ouvert la porte arrière sur un paysage de roseaux et de buissons. Il s’était immobilisé, muet. Je me penchai par-dessus son épaule pour voir ce qui le fascinait ainsi. Devant nous s’étendaient les eaux du lac, limpides et bleues, scintillant sous les premiers rayons du soleil. J’eus l’impression, et je devine que Jim devait ressentir quelque chose d’assez proche, j’eus l’impression d’être la première femme à la naissance du monde, et je saisis l’appareil photo pour tenter de capturer l’instant. La beauté du paysage, la pureté de l’air et l’amour que je portais à Jim, rien que des choses invisibles qu’aucune photo ne peut saisir.

Jamais dans ma vie je n’ai depuis retrouvé cette sensation d’éternité. Est-ce les blessures que la vie s’est chargée de m’offrir ensuite comme à tout à chacun – et la défaillance de Jim fut la première d’entre elles –  me faisant perdre à tout jamais mes restes de candeur enfantine ? Ou bien était-ce cette légère euphorie de l’état amoureux qui m’avait fait idéalisé ce moment ?

Puisque j’ai décidé de tout te dire, si je garde un souvenir si précis de cette photo, ça n’est pas seulement pour la beauté du lac au réveil. C’est aussi parce que c’est ce jour là que l’accident arriva, et que ma vie bascula dans l’horreur pour deux longues années.

A midi, Jim avait décidé d’aller au ravitaillement avec le van. Je l’accompagnais, bien sur. Le van, c’était à la fois notre véhicule et notre maison. En somme, une coquille d’escargot à deux places. Au petit déjeuner, nous avions du nous contenter d’un bout de pain sec arrosé d’une bière. C’est après le virage, que ça a eu lieu. A la décharge de Jim,  la route était sinueuse, les bas-côtés étaient mal entretenus, et l’âne ne tirait pas assez vite la carriole. Le choc a été terrible, le braiement de l’animal résonne encore dans ma tête. Après, tout a été très vite. Le corps du paysan avait été propulsé à travers les airs et gisait dans une position qui ne laissait aucun doute. Mort sur le coup.

La suite s’est enchainée, pantins s’agitant dans un film muet en noir et blanc. Jim m’a demandé de dire que c’était moi qui étais au volant. Si le permis de conduire lui était retiré, on ne pourrait pas rentrer en France, vu que moi, je n’avais pas encore le permis. A cet instant ce raisonnement tordu m’a paru imparable, alors j’ai accepté de prendre la responsabilité de l’accident. La police m’a arrêtée, Jim m’a quittée au commissariat en me disant qu’il s’occupait de tout. Tu parles ! Il a pris tout son temps pour rentrer en France, et prévenir mes parents.

Les pauvres. Avec le shit qui avait été trouvé dans mes poches, ils ont mis deux ans à me faire ressortir des prisons hongroises. T’imagines-tu ces deux années, enfermée vivante, sans contact avec l’extérieur, seule avec des femmes dont je ne parlais pas la langue ?

Alors cette photo, tu comprends pourquoi elle m’a marquée.

Jim, je ne l’ai plus jamais revu, même pas au procès où il ne s’est pas présenté. Reparti au Canada, probablement.

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Terjit 

« 12000 $, PLUS LES FRAIS »

Quel voyage, le plus grand et long de toute ma vie ! 5 pays traversés à pied, en voiture, en autocar, à vélo, en fonction des jours. Je n’ai jamais rencontré autant de gens différents en si peu de temps : Suisses, Italiens, Grecs, Turcs, Albanais, Tchétchènes, Croates, Russes,  et j’en passe, et au milieu de tout ce monde quelques Français.

J’ai toujours rêvé d’aller au Moyen Orient, de Châteauroux j’avais une vision un peu fantasmée, c’est vrai, mais j’ai traversé des paysages magnifiques, été ébahi par ces cultures suintant des pores de chaque mur, j’ai chaviré dans les odeurs de thé à la menthe, et ressenti l’apaisement dans cette cacophonie ambiante aussi culturelle que le gruyère pour un Suisse. Et enfin le rêve s’est réalisé : passer pour la première fois de sa vie devant ce panneau synonyme de liberté, après 6 mois et 20 jours de traversée, le 13 février 2021, jour de la délivrance.

Mon dernier parcours « en stop » s’est arrêté à une trentaine de kilomètres de la ville, au milieu d’une plaine désertique sous un vent glacial. Le chauffeur m’a fait signe qu’on était arrivé, alors qu’à l’évidence nous n’étions pas devant le souk. Quand j’ai protesté il m’a demandé 800 $ de plus pour faire les derniers kilomètres, en me montrant ostensiblement le renflement de sa veste dû à la crosse d’un révolver. Ce n’était pas la première fois que ça arrivait, j’ai donc récupéré mon sac à dos et ouvert la porte. Je me retrouvais au milieu d’une plaine immense recouverte de buissons épineux et entourée de collines allant de l’ocre le plus clair au plus brun, un décor de western spaghetti. Personne en vue, aucune route visible, un no man’s land d’une beauté à couper le souffle. La porte a claqué, il m’a fait signe d’aller tout droit vers l’est avant de démarrer en trombe, j’étais soulagé de le voir partir.

Avec le soleil rasant du matin j’avais un peu de mal à voir vers par quelle colline traverser, la moins haute possible tant qu’à faire. C’était peut-être le dernier obstacle que j’allais rencontrer, il s’agissait de le savourer celui-là ! Quand le soleil était suffisamment monté je pouvais prendre la mesure du chemin à parcourir. A vue d’œil les premières collines devaient être à une dizaine de kilomètres, j’ai mis 4 heures pour arriver au pied de la première. L’ascension s’est faite sans difficulté jusqu’au sommet, puis il y a eu la rencontre avec deux autres français : Victor et Clément. Ils arrivaient aussi de la plaine par un autre versant. Quand j’ai vu leurs silhouettes j’ai eu le réflexe de me cacher au milieu des broussailles mais j’ai très vite constaté qu’ils étaient habillés en civils et n’avaient pas l’air d’être du coin. Par prudence je suis resté caché, ils sont passés à trois mètres de moi, et Clément a dit « courage, courage ». Je suis sorti de ma cachette derrière eux et j’ai juste dit « il en faut du courage ». Ils ont eu peur un instant, mais en se retournant et en voyant que j’étais des leurs nous nous sommes tombés dans les bras.

Ils ont 24 et 26 ans et viennent de Biarritz. Victor est conducteur de bus, Clément chef de rayon dans une grande surface. Ils ont quitté Paris quelques mois après les élections, pour s’installer au pays Basque.

Dans le premier mois qui a suivi la prise de fonction d’Océane Le Guen les décrets sont tombés par centaines. Tous les sujets étaient concernés et passés à la moulinette: les impôts, la sécurité sociale, le terrorisme, les programmes scolaires, la durée du travail, la justice, la police, les fichages informatiques, les syndicats, l’armée, et bien sûr le sujet le plus en vue : l’immigration. Et comme si cela ne suffisait pas la vision qu’ils appellent « communiste » de la liberté de mœurs s’est évaporée sous la pression des milices citoyennes. Y compris dans le marais il était impossible de s’afficher avec son conjoint ou même de porter une tenue vous identifiant comme « déviant ». La gay pride a été annulée « pour raison de sécurité », les subventions aux associations ont été toutes retirées et la politique de prévention du Sida est maintenant dans les mains du ministre de l’intérieur.

La vie devenant totalement irrespirable ils sont partis à Biarritz pour rejoindre quelques amis qui avaient déjà déménagés et vivre dans un endroit encore sûr, croyaient-ils. Ils ont pris la précaution de se faire passer pour cousins, seul moyen pour deux hommes de trouver un appartement et un emploi. Ils avaient retrouvé le calme, ici les milices du sud-ouest étaient peu nombreuses et pas très virulentes. Jusqu’au jour où ils ont été dénoncés par le voisin de palier. La suite est habituelle : arrestation, prise d’empreintes génétiques, interrogatoires, menaces, brutalités. Malgré cela aucune preuve n’a pu être apportée des liens qui pouvaient les unir, ils ont donc été relâchés avec une mise en garde : « La prochaine fois c’est Pithiviers, on vous a à l’œil ».

Ils avaient mis 2 mois à planifier leur départ : rassembler l’argent nécessaire, prendre des contacts avec des passeurs, tirer quelques dollars des bricoles qui en valent la peine. Le grand jour était fixé un vendredi à 19h. Ils ont mis 9 jours de moins que moi pour arriver jusque-là, et ça leur a coûté 10500 $.

Ils m’ont demandé pourquoi j’en étais là, ce que j’avais fait et qui j’étais. Je leur racontais mon métier de tapissier à Châteauroux, mon engagement politique, mes éditoriaux dans le dernier journal libre. Puis les ennuis à répétition comme la fermeture de mes comptes bancaires sans explication, la voiture grise garée devant chez moi et qui me suit partout, mon ordinateur piraté, mon appartement cambriolé 4 fois dans la même semaine ou encore les lettres anonymes chaque matin dans ma boite aux lettres.  Par une relation au commissariat j’ai su deux heures avant qu’ils allaient venir m’arrêter pour m’interroger une énième fois, mais avec l’intention « de me faire avouer ma trahison par tous les moyens ». Moins de 10 minutes après je dévalais l’escalier avec mon sac à dos bourré de quelques fringues et de liquide. Je suis passé par la porte des poubelles le plus discrètement possible et j’ai disparu comme l’éclair.

Aujourd’hui nous marchons côte à côte, fiers d’aller vers la liberté, la prospérité, vers une vie normale, mais tristes d’avoir dû quitter la France, notre pays qui n’est plus qu’une gigantesque prison à ciel ouvert pour tous ceux qui soutiennent mollement le pouvoir et un cachot pour ceux qui osent contredire les discours officiels.
Nous atteignons les premières maisons, quelques enfant passent, indifférents. Au coin d’une rue déserte nous croisons deux policiers comme n’importe quels autres ici : moustachus. Le plus petit des deux s’est approché de nous et a sorti un papier du croissant rouge qu’il nous a donné. Dans un français approximatif, mais avec son sourire tout devenait compréhensible, il nous a dit que c’était la liste des centres d’hébergement et de demande d’asile. Après quelques remerciements d’usage nous avons passé le coin de la rue. A trois pas devant nous trônait un vieux panneau rouillé, il indiquait l’entrée de la ville. Nous nous sommes arrêtés net devant lui, comme si nous avions besoin de nous pincer pour réaliser que nous ne rêvions pas. Nous étions là, devant le panneau aux 5 lettres magiques qui faisait la petite phrase qui sert de mot de passe pour parler de « là-bas » entre migrants et que l’on se dit en s’endormant pour se donner le courage de continuer. Naturellement, spontanément, nos souffles se sont accordés et comme une ritournelle enfantine nous avons dit en cœur : Debout Ames Meurtries Agonies Sacrifiées.

Au premier battement de cil j’ai senti une légère irritation, au second une première goutte est apparue et au troisième j’étais aveuglé par les larmes. Nous nous sommes embrassés longuement tous les trois au pied du panneau, à un pas d’un futur possible, unis par l’exil.

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Les textes écrits sur d’autres blogs :

103 Commentaires

  1. Valerie

    @Alexandra : un texte plein d espoir.merci beaucoup.

    • Leiloona

      Merci. 🙂

  2. Adele

    @Leiloona : un texte que j’adore, plein de fraîcheur et d’espoir. J’aime le message qu’il véhicule, la résilience toujours possible et … l’amour naissant, bien sûr. Le tout dans ce style épuré que tu manies avec tant de talent.

    • Leiloona

      Merci Adèle ! 🙂
      J’ai déposé ce texte hier soir, j’avais fait deux brouillons dans le train qui ne ressemblaient pas du tout à ce que j’ai écrit. La narration était poussive.
      Là, c’est sorti tout seul. 🙂

  3. Leiloona

    Ludo : Le monde que notre plume invente est sans limites, lui. 🙂

  4. Leiloona

    Claude : Arff la dernière phrase. Terrible. Quand la liberté a un sale goût dans la bouche, que nous reste-t-il ?
    (Mon petit doigt me dit que cet homme repartira très vite vers ce partage qu’il aime tant, je me trompe ? 😉 )

  5. Leiloona

    Manue : Une fable avec une fin poétique. Il est des êtres qui fondent une existence … et tu l’as très bien retranscrit. Entre douceur et profondeur.

  6. Leiloona

    Jos : Joli ! Un art de la photographie, et effectivement, le photographe est aussi un bel impressionniste qui capte et capture la lumière.

  7. Leiloona

    Nady : Ton texte me fait penser à la vie du papa du meilleur ami de mon fils. Ils se voient peu, ils vivent à des milliers de kilomètres. Guère évident tout le temps, hum. Quand ils se voient c’est toujours un lien de grande qualité, mais … mais, cela m’interpelle tout de même. 🙂

    • Nady

      C’est plus courant que ce que l’on croit. J’ai un ami dans cette situation. Je le ramasse à la petite cuillère parfois mais il n’a pas le choix. Pitchoune est ado maintenant, très équilibré, adorant son beau père et son papounet chéri. Merci pour ta lecture bella 😉

  8. Leiloona

    Sarahvage : Oh un bourlingueur de l’extrême ! 😉
    Parfois nul besoin de partir loin pour vivre de grandes émotions. 🙂

    • sarahvage

      Quand j’étais petite, je jouais à l’aventurière… dans ma chambre…dans une cité de Tours… C’était quand même mieux d’y jouer chez mes grands-parents à la campagne!

  9. Leiloona

    Adèle : Au moins, il a pu repartir, son permis en poche ! 😛
    Bon … un texte tout en contrastes retenus : une sale affaire, mais elle en garde tout de même un joli souvenir des instants vécus juste avant …
    En tout cas, deux ans dans une prison hongroise avant les années 80, ouch, cela devait être rude, elle doit en avoir des choses à raconter. 😉

  10. Albertine

    @ Leiloona : un beau voyage à rebours pour trouver la paix intérieure.

    • Leiloona

      Merci. 🙂

  11. Albertine

    @ Ludo : Plus que jamais, il nous faut, tu le dis si bien, « s’ouvrir à la lumière ».

  12. Albertine

    @ Claude : Après une détention aussi longue, la « liberté » effectivement n’est pas facile à apprivoiser; En lisant ton texte, j’ai beaucoup pensé à jean-Paul Kauffman.

  13. Albertine

    @Manue : Découvrir chaque jour des matins nouveaux pour la femme aimée, magnifique idée ! Un très beau texte, onirique parfois, animé par le souffle de l’amour qui dure au-delà de la mort.

  14. Albertine

    @ Jos : Je suis partante pour « écrire avec le soleil » ! Très jolie formule …

  15. Albertine

    @ Adèle : Passer du « premier matin du monde », de « l’instant parfait » à la noirceur d’un cœur et d’une prison. Un texte montagnes russes !

  16. Albertine

    @ Sarahvage : « Splendide » portrait d’un aventurier en charentaises ! Merci pour le rire matinal !

    • sarahvage

      Y’a pas de quoi! J’aime bien ton image de l’aventurier en charentaises! J’sais pas pourquoi, j’imagine un croisement entre Gaston Lagaffe et Garfield là… 🙂

  17. framboise

    Merci pour tout et pour aujourd’hui surtout <3

    • Leiloona

      Des bisous, ma poulette. ♥

  18. Nady

    @Leil : tout simplement merveilleux et so true !

    @Ludo : d’actualité !

    @Claude : triste réalité, merveilleusement décrite, des émotions des otages libérés

    @Manue : un deuil qui prend la forme d’une fuite… Que la paix lui revienne vite pour une meilleure stabilité…

    @Jos : très belle description du métier artistique de photographe ! Philippe va être content ! 😉

    @Adèle : Arghhh l’amour ! ce beau sentiment qui fait perdre toute raison jusqu’à s’en gâcher une vie parfois ! Terrible cette histoire entre ces 2 là ! ça ne lui portera pas chance à lui !

    @Terjit : Description d’un futur proche ??? Terrifiant…

    @Sarahvage : ai beaucoup ri 😉

    • Leiloona

      Nady : Oui ! Le chemin est parfois long pour le parcourir … Après, n’est-on pas arrivé à une certaine forme de sagesse ?
      En tout cas #breathe ! 🙂

  19. Leiloona

    Terjit : Eh bien je vois que l’actu t’a inspiré un renversement du monde … La vie à l’envers, oui.

  20. Virginie Vertigo

    @leiloona : Joli texte plein de douceur et de simplicité comme celle d’aimer.

    • Leiloona

      Merci ! 😉

  21. Virginie Vertigo

    @Ludo : J’aurais presque eu envie d’ajouter « Et la vie est trop courte ». Jeu sur les ombres et lumières tellement d’actu.

  22. Virginie Vertigo

    @Claude : Ton texte est très fort. Cette nouvelle liberté après des années de séquestration semble être une nouvelle prison pour cet otage. Tu nous invites à la réflexion. La vraie liberté serait-elle celle qu’on s’octroie et non celle qu’on reçoit ?

  23. Virginie Vertigo

    @Manue : Ton texte est très poétique et doux malgré la noirceur du deuil. J’aime bcp.

  24. Virginie Vertigo

    @Jos : Très bel hommage à la photographie. Plus qu’un instantané d’un instant T, une manière de peindre, d’écrire le monde qui nous entoure avec nos propres yeux.

    • Virginie Vertigo

      Pff « instantané d’un instant T »… je fatigue faut croire… LOOL

  25. Virginie Vertigo

    @Nady : Nous avons le même titre pour nos textes mais le contenu diverge évidemment.
    Il ne fait pas bon d’être dans l’entourage de cet homme où tout le monde meurt de façon brutale. Il semble avoir une jolie relation avec son fils mais en même temps il ne le voit que peu et s’investit peu. C’est mon (petit) bémol à cet hymne à la liberté. Merci miss.

    • Nady

      Hihihi, si je te dis que cet entourage est ce que nous vivons avec mes collègues 😉 3 morts sur 3 ans…. et au 2ème, la personne qui s’est risquée à dire ‘jamais 2 sans…’ a failli y passer mais a été sauvée in extremis par un proche présent au moment de son malaise… mais bon, ça va maintenant, le sort semble être parti, les collègues démissionnent à tour de bras en ce moment 😉 merci pour ta lecture, j’attaque les blogs asap.

  26. Mary

    @TOUS . Tant pis ça va faire un peu « école des fans » mais je vous ai tous trouvés très inspirés par cette photo ! J’ ai pris beaucoup de plaisir à vous lire cette semaine !

    • Leiloona

      Pas grave, c’était bien l’école des fans ! 😀

  27. Virginie Vertigo

    @Sarahvage : Une bien curieuse façon de voyager… 🙂 Après tout les plus beaux voyages sont ceux de l’esprit.

  28. Parlonslittérature

    Leiloona ton texte est magnifique. Il ne faut pas avoir peur de se poser.

    • Leiloona

      Merci ! 🙂
      Se poser est essentiel, en effet oui.

  29. L'ivresse littéraire

    @Leiloona : quelle douceur dans ce texte et cette rythmique, que j’aime ! Le voyage vers l’amour est aussi beau que celui des paysages.

    • Leiloona

      Rythme et douceur ? Parfait alors ! 🙂
      Paysage extérieur, paysage intérieur, les deux vont de pair … On ne regarde jamais aussi bien l’extérieur quand le paysage intérieur est apaisé aussi. 😉

  30. Parlonslittérature

    Nady : Beau texte sur la liberté
    De voyager et de s’évader
    Loin des contrariétés.
    J’ai beaucoup aimé,
    Toutes ces rimes en é ^^

    • Nady

      Merci 😉 tu rimes bien aussi en é 😉

  31. L'ivresse littéraire

    @Ludo : juste quelques mots, essentiels, d’actualité. Oui laissons la lumière entrer !

  32. josplume

    @Leiloona : La simplicité d’aimer : comme c’est bien dit ! Revenir en arrière pour mieux avancer…C’est tellement vrai ! Merci Leiloona.

    @Ludo : Court mais explicite. Une porte sur le silence, pour mieux s’ouvrir à la lumière… J’aime beaucoup l’image !

    @Claude : La notion de liberté est différente selon chacun et selon son vécu. C’est très bien expliqué dans ton texte. Belle description de ce que doit ressentir toute personne prise en otage.

    @Manue : J’aime beaucoup ton texte. Poétique, délicat mais avec une grande force. Bravo Manue.

    @Nady : La liberté a un prix et fuir la société c’est aussi s’éloigner de ceux que l’on aime. Il faut une sacrée dose d’amour et de compréhension en face. Mais bon, tout n’est qu’affaire de choix. Un sujet qui revient souvent dans tes textes, mais j’aime bien l’angle de celui-là.

    @Sarahvage : Deux textes en un. La première partie est crédible et j’imaginais bien la situation extrême dans laquelle se trouve ton personnage. La deuxième a mis fin à l’aventure, et m’a ramenée à la réalité avec humour. Bravo pour le mariage des deux !

    @Adèle : La chute est souvent proportionnelle à l’ascension et la déception à la hauteur de l’amour. Mais bon, elle préserve en elle les bons souvenirs du temps passé avec ce Jim (mais pas sûr qu’il le mérite) malgré les 2 années terribles qui ont suivi.

    @Terjit : Ton texte a une résonnance toute particulière en ce lundi… Il est terrifiant et réaliste. Cependant, je ne sais pas quoi penser de la décision de fuir : Ne combat-on pas mieux son ennemi de l’intérieur, faut-il baisser les bras et fuir : la fuite est-elle la réponse appropriée ? Mais bon…c’est facile à dire quand on est tranquillement assis derrière sa tablette et que le problème ne se pose pas…encore.

    • Leiloona

      Jos : Oh ça y est, tu t’es lancée, tu as ouvert un blog ? Tu vas donc voler de tes propres ailes ? ♥
      Merci pour ton retour.

    • Nady

      Merci jos. Oh que oui la liberté a un prix, et quel prix parfois !!!

    • Sarahvage

      Merci Jos! Faire sourire ou faire rire… Quel beau carburant dans la vie !

    • sarahvage

      J’adore faire ça : revenir de façon brutale mais humoristique à la réalité!
      Puis en règle générale ça fait rire les gens : et ça, j’adore!

  33. Claude

    @ Leiloona : depuis quelques temps tu adoptes un autre genre, un autre vocabulaire. J’aimais beaucoup avant et j’aime autant maintenant. C’est joli et tendre et le rythme de ton texte est superbe. Il y a beaucoup de tendresse, et cela fait du bien…

    • Leiloona

      Ah c’est « marrant » car tu n’es pas le premier à me le dire. Je ne le vois pas forcément, disons que cela m’interpelle, et j’essaie de décortiquer le pourquoi du comment, mais je n’arrive pas à apercevoir ces changements. Mais c’est pour cette raison que c’est un atout non négligeable (voire même essentiel) d’avoir des regards extérieurs. Merci en tout cas. 🙂

  34. Claude

    @ Ludo : peu de mots pour dire tant de choses; Bravo, j’adore.

  35. Claude

    @ Manue : j’ai beaucoup aimé la poésie qui se dégage de ton texte. C’est beau et émouvant. Bravo.

  36. Claude

    @ Jos : Bravo pour cet hommage à la photo. Ecrire avec la lumière est bien la racine étymologique du mot photographie. Ton texte me fait très plaisir. Merci.

  37. Claude

    @ Nady : encore un sujet de conversation que j’aimerais avoir avec toi : le voyage… Ton texte est beau par le rythme de tes mots, mais aussi par son contenu plein d’aspiration à une certaine forme de liberté…

    • Nady

      Oh Claude, je suis honnorée et flattée par ton retour. Oui, oui, oui, on va se caler une date voire plusieurs pour toutes ces discussions 😉 belle semaine à toi

      • Nady

        honorée avec un seul n ferait mieux pour les yeux 😉

  38. Claude

    @ Sarahvage : Excellent. Je me suis laissé porter, j’ai voyagé, pour me retrouver dans un garage au fond du jardin… Bravo, c’est bien fait.

    • Sarahvage

      Merci Claude !

  39. Valerie

    Bonjour à tous.Cette semaine le temps m’a manqué et je n’aurai que le plaisir de vous lire mais c’est déjà énorme.
    @Ludo : court mais incisif.
    @Claude: un texte rondement bien mené . Il m’a rappelé la triste expérience de mon cousin Christian Piveda qui comme ton personnage avait tissé des liens forts avec les gens d’un village du San Salvador le gang des Maras. Il a eu moins de chance que ton héros car lui n’a pas été kidnappé mais assassiné. Son dernier reportage La vida loca raconte le partage qu il a eu avec ces personnes. Ton texte m’y a vraiment fait pensé. Merci
    @Manue : un texte très touchant où le voyage tente de prolonger la beauté d’un amour mort trop tôt…
    @Jos : belle description du métier de photographe qui essaie de donner encore plus de beauté à ce qu il a devant les yeux, jouant avec la lumière, un plan, un détail.
    @Nady : j’aime beaucoup ton texte qui raconte l’histoire d’un homme qui décide de profiter de la vie et de sa liberté avant qu il ne soit trop tard, avant le burn out, l’AvC ou la crise cardiaque. Certes il s’éloigne de Pitchoune mais c’est pour le bien de tous et le petit vit avec son papa particulier des moments particuliers alors… Je monterai presque dans son van.
    @Sarahvage : drôle d’aventure qui finit dans le garage J’ai souri.merci.
    @Adele : une terrible histoire qui commence très peace And love et qui finit durement. Heureusement ton héroïne semble remise et garde du positive de cette sacrée​ épreuve.
    @Terjit : Terrible retournement de situation.Nous devenons à notre tour les « migrants » qui fuient un régime devenu totalitaire et complètement fou…Que ton texte ne soit pas prémonitoire surtout!

    • Nady

      Merci Valérie pour ton retour plein de bienveillance. J’y suis montée un peu dans son van et n’ai pas regretté les beaux moments partagés et de découverte d’une partie du monde 😉 mais certaines personnes aiment la liberté plus que tout, alors il faut aussi savoir les laisser poursuivre leur chemin seul.

  40. Claude

    @ Adèle : Tu décris bien l »aventure » des années 70. L’insouciance trouvait parfois des limites graves. Certains y trouvaient le paradis terrestre, d’autres les paradis artificiels, mais il y en a qui ont connu l’enfer.

  41. Claude

    @ Terjit : J’ose dire que ton idée de texte est géniale. Cela dit, il pose un drame surréaliste, espérons-le. Mais il dépeint bien le sentiment des migrants actuels qui fuient la violence, avec cette solidarité de circonstance. Bravo, j’ai beaucoup aimé malgré les circonstances…

  42. adèle

    @Ludo : je t’ai vu, tel un cosmonaute, flottant autour de notre planète. Dis, tu reviendras, hein ?

    @Claude : j’ai pensé à ces 4 journalistes, il y a de ça peut-être 20 ans ou plus, que les médias n’appelaient plus que « les otages du Liban », participant ainsi à la chosification de ces 4 hommes. Tu as très bien décrit ce processus de déshumanisation. Et le retour à la vie normale, presque impossible. Pensée pour le livre bouleversant, Le quatrième mur de Sorj Chalandon.

    @Manue : j’ai trouvé la 1ère et la dernière phrases sublimes ! Un texte lumineux qui donne beaucoup d’espérance et de consolation.

    • Manue Rêva

      Les trois premières lignes ne sont pas de moi, mais de Bénédicte ! Elle a juste écrit ce haïku et, de sa lecture et avec la photo, le reste du texte a suivi !!!

  43. adèle

    @Jos : comme c’est joli, peindre avec la lumière ! Je n’avais jamais pensé l’art photographique ainsi. Tu as raison de me rappeler qu’en dehors de la connaissance de la technique, c’est l’âme du photographe qui donne la beauté à l’image.

    @Nady : surement pas facile de faire, pour se sauver, ce choix égoïste, un peu lâche, mais nécessaire à la survie physique ou mentale. J’ose espérer qu’il existe d’autres chemins. Souvent restent des mères qui, elles, n’ont pas le choix.

    • Nady

      Merci pour ta lecture Adèle. Oui, j’aurais eu du mal à écrire ce texte avec une femme mère dans le rôle principal… peut être parce que le lien qui nous unit avec notre mini nous vient de nos entrailles ???

  44. adèle

    @Sarahvage : stupéfiante histoire, bien amusante, bien écrite, très vivante ! J’ai juste été étonnée de l’âge du personnage.

    @Terjit : il suffit d’un changement de perspective pour se retrouver dans la peau de l’autre. C’est si facile et si confortable de penser que ça ne nous arrivera jamais. Faisons faire un peu de gymnastique à notre imagination. Merci.

    • Sarah Fautrelle

      @adèle : Tu t’attendais à plus âgé ou moins ?

      • Adele

        Beaucoup plus jeune ! Disons que 30 ans pour moi, ça change complètement l’histoire, car il me semble qu’à 30 ans la plupart ont commencé à vivre une vie d’adulte. Donc ton héroïne à un parcours inhabituel. Pourquoi à 30 ans mène t elle la vie de quelqu’un de 16 ans ? Et la on peut tout imaginer … intrigant 🙂

        • Leiloona

          Intéressant de voir la différence entre ce que pense l’auteur au moment où il écrit et ce que projettent les lecteurs ! 😉

        • sarahvage

          Y’ avait un p’tit indice dans le titre… Tanguy c’est le titre d’un film humoristique retraçant la vie d’un trentenaire vivant encore chez ses parents et ne voulant pas quitter le nid familial.
          D’ailleurs c’est marrant, tu vois en mon personnage une femme alors que j’y vois un homme, mais c’est chouette!

  45. sarahvage

    @leliloona : Quelle belle rencontre avec l’amour ! Aimer n’est-il pas le plus beau des voyages ?
    J’adore !

    @ludo : Court, incisif, piquant et porté vers l’espoir, vers un ailleurs plus lumineux… 6 phrases qui résonnent en moi.;)

    @claude : Ton texte m’a fait pensé à cette chanson de La Canaille « Monsieur, madame »… Elle sonne à mes oreilles quand je lis ton texte. La générosité a effectivement bien des visages et pas toujours ceux que l’on croit…
    J’ai adoré ce texte !

    @manue : J’ai pas pleuré, j’ai pas pleuré, j’ai pas pleuré… Une petite larme quand même ! Ton texte m’a donné des frissons. Merci !

    @jos : Oh comme il me donne envie de prendre mon sac à dos et mon appareil photo ton texte ! Bon, faudrait déjà que je maîtrise un peu mieux le mode manuel…;)

    @nady : Tout quitter, lâcher prise avec un quotidien morne et monotone et pas en adéquation avec nos valeurs… Une ode à l’espoir !

    @adele : Le shit c’est pas bon ! L’herbe c’est mieux !:) J’ai bien aimé imaginer ce séduisant Jim qui finit par être le véritable monstre de l’histoire ! Ai bien envie de le trouver pour lui mettre une ou deux tartes à çui là !

    @terjit : Oceane Le Guen… Son père est borgne ? Qu’a fait ton personnage ? J’aime imaginer que c’est un anarchiste devant fuir une terre fasciste…

    • Leiloona

      Merci Sarahvage : Alors pour moi ce n’est pas seulement l’acte d’aimer ici (il y est associé à une sacrée belle simplicité). 😉 Mais c’est toujours intéressant de voir ce que les lecteurs perçoivent dans un texte.
      Merci ! 🙂

    • Nady

      Merci 😉

  46. L'ivresse littéraire

    @Claude : de l’ombre à la lumière mais une lumière que l’on sent trop éblouissante, une lumière dont on ne sait s’il s’agit réellement uniquement d’une lumière de liberté. Un écrit tout en nuance que tu nous offres Claude avec le portrait d’un homme touchant, perdu mais qui ne le serait après une telle épreuve ?

  47. L'ivresse littéraire

    @Manue : Cet homme souhaiterait-il vivre entouré de ces paysages rêvés ? Je le vois comme un hommage à cette femme tant aimée. C’est doux, profond, émouvant. Bravo !

  48. L'ivresse littéraire

    @Jos : Quelle belle aventure pour cet artiste. Parcourir les paysages de ce monde, reculer les frontières, foulées les terres ô combien magnifiques. Qui n’en rêverait pas ? En tout cas moi je l’accompagnerais bien cet aventurier.

  49. L'ivresse littéraire

    @Nady : la liberté coûte que coûte, parfois l’égoïsme d’un choix et les kilomètres qui séparent permettent de renforcer un lien qui n’aurait pas été le même si la personne était restée. C’est un choix difficile à prendre et à accepter mais cet homme a vécu des pertes qui furent son déclic. Et finalement son bonheur semble contagieux 🙂

    • Nady

      Tu as tout compris l’ivresse 😉

  50. Antigone Héron

    Un peu occupée depuis lundi. Je vous lis demain… 😉 Merci pour vos doux passages chez moi !

  51. Manue Rêva

    @Alex : Une si jolie conclusion … la simplicité d’aimer … le ressentir cet amour, le comprendre et puis le dire ensuite, parce qu’il n’est jamais trop tard effectivement.

    • Leiloona

      Et heureusement ! 😉

  52. Manue Rêva

    @Ludo : Les autres parlent de lumière dans leurs commentaires, moi ce que j’ai aimé c’est « Pour ne plus les entendre » parce que parfois un peu de silence, un peu de recul, un peu de réflexion, un peu de … , qu’est-ce que ça serait bien !!!!!

  53. Manue Rêva

    @Claude : Je me demande où commence et où se termine sa liberté … et la liberté tout court … Intéressant !!!

  54. Manue Rêva

    @Jos : Tu as raison de souligner que les photographes sont des artistes, car leur regard est magique !!!

  55. Manue Rêva

    @Nady : Toi aussi tu parles de liberté, ton personnage est libre, certes, mais que fait-il des autres ? Et être libre seul, cela a t-il un sens ? (ne me remercie pas d’avoir trouvé le prochain thème de ton café philo !!!) Intéressant aussi !

    • Nady

      Ta question est intéressante… me la suis posée quand j’ai entendu un proche âgé me dire qu’elle préférait avoir à faire à des machines (caisses automatiques, machine de verif de passeport dans les aeroports…) qu’à l’ Humain avec ses humeurs changeantes…. J’ai mis du temps à le comprendre mais en analysant mieux les ‘humeurs’ du personnel en contact avec le public dans plusieurs endroits, me suis dit un jour qu’elle n’avait pas tort… et puis, y a tellement de monde qui s’occupe et parle surtout pour le collectif, qu’un peu d’égoïsme même en solo ne peut être que salvateur dans ce monde d’hypocrites…. du moins, c’est mon avis qui se confirme de jour en jour ces derniers temps…. merci pour ta lecture, heureuse qu’elle en sorte une belle réflexion

  56. Manue Rêva

    @Sarahvage : Bel éclat de rire grâce à ton texte !!! Ce pauvre Tanguy fait pitié … sa mère a encore du boulot avant qu’il ne quitte le nid … il n’a pas l’air tout à fait prêt pour partir à l’aventure, celle de sa vie sans môman !!!!

  57. Manue Rêva

    @Adèle : Reparti au Canada, j’espère qu’il se sera fait bouffer par les ours, les caribous, …

  58. Manue Rêva

    @Terjit : Brrrrrrrrrrrr … Et si on résistait ?

  59. Antigone Héron

    Leiloona : oh comme ton texte est beau et doux… 😉
    Ludo : parfois oui, il semble bien étroit ce fichu monde 🙁
    Claude : très bien trouvée cette inspiration. Si bien que j’ai regardé de nouveau la photographie proposée avec ton regard. J’ai beaucoup aimé lire ton texte !
    Manue : la fuite et l’oubli, ton texte a des ressemblances avec le mien je trouve…
    Jos : ton texte est très beau, j’ai beaucoup aimé cet instant passé en compagnie d’un photographe, et de la lumière…
    Nady : parfois on a effectivement envie de ça, lâcher les amarres, et cela tient peut-être à pas grand chose la liberté… même si laisser un enfant à sa mère peut me sembler un peu égoïste, mais il y a des gens qui ne se sentent bien que sur les routes et que l’on ne peut enfermer…
    Sarahvage : la fin de ton texte (mouarf)… merci pour cet éclat de rire du matin.
    Adèle : ah mince !! comme quoi il faut se méfier du calme apparent d’une photo prise à un instant T.
    Terjit : j’ai été complètement emportée par ton texte, merci.

    • Leiloona

      Merci Antigone ! 🙂

    • Nady

      Merci pour ta lecture Antigone. Oui, comme tu le dis si justement, on ne peut pas les enfermer et quelle belle preuve d’amour de la part de son enfant plus tard de ne pas en vouloir à son père pour cela… Mais bon, souvent je rêve aussi 😉

  60. La plume et la page

    @Leiloona: un texte qui donne envie d’aller de l’avant

    @Ludo: c’est vrai que le monde peut paraître petit parfois.

    @Claude: je me suis toujours demandé ce que pouvait ressentir quelqu’un qui venait d’être libéré et qui a été enfermé pendant plusieurs années.

    @Manue: partir et n’avoir comme attache que son 4X4…

    @Jos: tu résumes bien ce qu’est la photographie.

    @Nady: comme j’aimerais, moi aussi, jeter la clé de l’appart pour partir à l’aventure…

    @Sarahvage: petite excursion dans le garage… Un texte qui ne manque pas d’humour!

    @Adèle: souvenirs, souvenirs…

    @Terjit: la politique de prévention du Sida dans les mains du ministre de l’Intérieur, je demande à voir!

    • Nady

      il faut savoir oser le faire parfois… mais encore faut il le pouvoir…. Merci pour ta lecture 😉

  61. L'ivresse littéraire

    @Sarahvage : excellent récit sur ce Tanguy aventurier … mais pas trop ! J’ai beaucoup ri, ton récit est très bien mené. Bravo !

  62. L'ivresse littéraire

    @Adèle : quelle terrible histoire. Ce qui devait être un voyage inoubliablement beau et heureux se termine en une destination dramatique. Quel c*** ce Jim, je lui collerai bien mon poing dans la figure tiens (oui je peux être violente parfois :p) !

  63. L'ivresse littéraire

    @Terjit : inversement de l’Histoire … Cela fait tout drôle à lire … J’espère que nous n’arriverons pas à ce stade là … En tout cas c’est extrêmement bien écrit comme toujours et ça donne la chair de poule !

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