Allongée sur les vagues
La femme redevient poisson
Le poisson primitif
Qu’ils étaient tous
Avant de devenir humains
Pensants et réfléchis
Philosophes ou chirurgiens
Drogués ou alcooliques
Assassins ou victimes
Promoteurs ou dictateurs
Golden-boys ou filles-de-joie
Un cœlacanthe
Au corps de fossile
Au poumon ancestral
Et aux nageoires charnues
Prémices de leurs membres
Elle s’enfonce dans les profondeurs
Où la lumière s’éteint
Elle ne sait plus penser
Aux ravages causés par les siens
Sur cette terre
Elle ne réfléchit plus aux conséquences
De son « évolution »
Son cerveau s’est réduit
Bras et jambes s’atrophient
En de courts moignons recouverts d’écailles
Elle respire différemment, mais elle vit
Descendant au plus profond des abysses
Une seule conviction ancrée dans son instinct
Ne plus jamais refaire surface.
Tu peux venir te poser près de moi.
Je suis là, tu le sais.
Je ne résiste pas à entendre chaque jour ta voix,
mais nous voilà confinés,
toi, à 600km de moi.
Cette distance ne m’a jamais parue aussi éloignée.
Et pendant que je me soucie pour toi,
dans cette capitale polluée,
entre quatre murs sous ton toit,
moi, dans notre campagne, havre de paix,
la maison de ton enfance quoi,
je te vois évoluer avec grâce et agilité
là bas.
Ma fille, ma sirène, je me délecte de voir ta légèreté.
On dirait que tu lévites sans poids,
dans ce monde plein de gravité.
Merci mon enfant, j’aimerais être aussi libre que toi,
dans cette morosité.
Apprends moi comment tu fais.
C’est l’histoire d’une princèse qui s’appelait Rou. Son père été le roi est sa mère la rène.
Elle été trè maleureuse parce que son père et sa mer ne l’amé pa.
Alors elle allé dans le parc du chato et elle écouté les oizeau chanté surtou les pijon quel aimè bocou.
Elle auré bien voulu roucoulé come les pigon.
Une nui, elle s’endorma et une fée vena la voir pendan son somey. La fée lui disa que pour chanté come les pijon il falè mangé dé cayou. Sur le cou, Rou ne comprena pa mai elle fesa confiense à la fé et elle manga plin de cayou.
Mais elle ne chanté pa come les zoizo.
Alors elle u soif. Elle coura dan le parc du chato et se dirija ver le basin ou il y avé dé nénufar et dé canar.
Elle se bessa pour boir car les cayou pesè lour dans son ventr.
Et le poi dé cayou l’entrènère et ellé tonba danlo.
Elle n’avè jamè apri à nagé.
Alor…… la princèse Rou coula.
***********************************************
Je sors…
J’aime l’eau sous toutes ses formes: à boire, plate, gazeuse; à voir, ruisseau, torrent, barrage, rivière, fleuve, mer, océan, piscine; à la toucher, à y rentrer et à nager dès que je peux et même dans une eau que d’autres trouvent trop fraîche. Par contre, je n’aime pas trop avoir la tête sous l’eau, pas plus que nécessaire pour passer d’une ligne à l’autre à la piscine. Je t’ai souvent dit que j’aimerais faire de la plongée sous-marine mais c’est un peu incompatible avec ma claustrophobie.
22 mars 2020
Kroum
sur 22 mars 2020 à 18h43
Joli texte sur l’eau dont je ne suis pas adepte pourtant. Je lui préfère le vin et les prairies. Bravo Laura !
Quel fou rire..ce sidi, en arabe et en moi même car je parle les deux langues!! tu aurais pu éviter les quelques erreurs d’orthographe que j’ai cru voir!!
pour ceux qui se demandent de quoi on parle..nous sommes..de la même famille Amor fati et moi!!
Narcisse féminine voit son double essayer de s’agiter pour ne pas couler.
Quelle belle illustration de l’état dans lequel nous sommes ! Confiné dans cette matrice qu’est devenu notre foyer à essayer de ne pas céder à la peur de mourir. Ne pas céder aux mauvaises nouvelles. Ne pas céder aux vagues déferlantes qui vont nous ébranlées. Ne pas céder à l’inquiétude pour ceux chéris. Ne pas céder à la colère qui ronge aussi.
Rester digne et solide dans cette tourmente, même si le regard des autres manque. Alors sans lui, il y a soi. Pensons à la Princesse aux eaux dormantes !
vagabondageautourdesoi.com
On se rejoint un peu dans l’image, mais juste un peu 😉
Cloud
sur 23 mars 2020 à 10h16
Oui. Attendre sereinement. On en sortira plus fort.
Cloud
sur 22 mars 2020 à 21h01
(Suite du jour 5 du Corona)
Je m’appelle Marcel. Je suis marin, et suis marié avec une sirène. Nos vivons dans un petit coin du Pacifique à quelques centaines de mètres de fond dans une grotte modeste, mais coquette.
Pas facile aujourd’hui d’être confiné avec une sirène qui ne cherche qu’à prendre l’air. Cela dit, je la comprends. Moi, je m’adapte à cette situation insolite de confinement inédit. J’en profite pour relire Vingt Mille Lieues sous les Mers, Moby Dick, La Baleine Thébaïde,…
Mon histoire n’est pas banale, Si la mer est mon métier, seule sa surface était dans ma fiche de poste. Pourtant le seul attrait pour une sirène m’a été fatal. Tout le monde ne s’appelle pas Ulysse pour s’attacher à un mât afin d’éviter de succomber au charme. Non, moi j’ai craqué dans tous les sens du terme : je l’ai suivie, le bateau a dérivé, s’est fracassé contre un rocher, et je me suis laissé emmener pour le meilleur et le pire : un mariage au fond de la mer.
Aujourd’hui, pandémie oblige, nous sommes calfeutrés dans notre grotte sous-marine avec un stock de poissons et d’algues pour tenir des semaines. Je rêve à mon village de Cronalec, à ma maison, à mon bateau. Tandis que je regarde ma femme avec le même amour, je sculpte méticuleusement des chutes d’épaves trouvées ici ou là. Et sur le bois gorgé d’eau, je grave de mon burin qui ne m’a jamais quitté :« Souvenir de Cronalec sur Mer », surmonté d’une sirène enroulée.
Sous ses pieds, il y avait un miroir aux reflets bleutés.
Sous ses pieds, il y avait une fenêtre, un tapis de verre qui ne semblait exister que pour dire ce qui ne pouvait être dit.
Elle avait arpenté ces couloirs des centaines de fois, sans jamais remarquer ce qui gisait en dessous. Dans l’ancienne maison familière, aux poussières de mémoire, elle avait foulé le même sol mais jamais n’avait su voir sous les lattes de plomb.
Pourtant, cela avait toujours été là, sous ses pieds. Les bruits qu’elle entendait la nuit, quand elle sortait de sa chambre pour chercher un verre d’eau, et qu’elle prenait pour les chants d’une bête sauvage au loin. Ces cris qu’elle croyait percevoir le jour, perdus parmi les rires des enfants dans la cour.
Toute dans son enfermement / les murs encombrés des dessins des résidents – rien que le murs où se perdre, et pourtant…
Pourtant, aujourd’hui, alors qu’elle était revenue dans ces lieux oubliés, elle avait senti pour la première fois cet espace, cette présence en dessous.
Et elle avait compris, enfin, ce qui lui avait toujours échappé.
Des années, des décennies, qu’elle s’était perdue, qu’elle s’était noyée. Un regard vers la glace qu lui avait renvoyé son image : elle était restée là, conservée dans une eau glaciale dans les fondations même d’autrefois. Elle était restée là, intouchée, et le corps qui avait grandi et vécu plus tard, loin de l’institut, n’avait été jusqu’à ce jour qu’une marionnette, une peau morte secouée par les vents.
J’avais probablement un peu trop bu pendant cette soirée magnifique au bord de la falaise quand j’ai basculé dans l’eau. Evidemment personne ne s’en est aperçu ou bien ils étaient trop saouls pour réagir.
Il faut dire qu’il y avait du monde ce soir-là et que les conversations allaient bon train.
Quoi qu’il en soit, dès que j’ai commencé à couler j’ai ressenti un bien-être incroyable. Les bruits me parvenaient totalement assourdis. Je flottais littéralement comme un bébé dans le liquide amniotique.
Des images abstraites ont envahi mon cerveau, un peu ramolli à ce moment il faut bien le reconnaître, mais elles me faisaient un bien fou tout en m’hypnotisant agréablement en même temps.
Je voyais bien quelques bulles remonter à la surface mais ça me faisait plutôt sourire en pensant à celles de tout ce champagne qui avait coulé le long de ma gorge.
J’ignore le temps qu’a duré l’incident mais quand même, à un moment, quelqu’un a vu flotter ma robe comme d’immenses nageoires translucides et s’en est inquiété.
Ce qui s’est passé ensuite est très confus dans mon esprit. On m’a raconté qu’un des serveurs avait plongé pour me remonter à la surface. Quelle chance qu’il n’ait pas été autorisé à boire pendant son service!
Autant avouer que j’avais piteuse allure quand on m’a sortie de l’eau, ma coiffure sophistiquée et ma robe collant à mon corps ne m’avantageaient pas vraiment. J’étais bien loin de la beauté altière qui avait attiré les regards flatteurs quand j’étais arrivée!
Je frissonnais malgré la couverture dans laquelle on m’avait enroulée.
Je me souviendrais longtemps de cette mésaventure mais, plus que tout, c’est le sentiment de bien-être immense quand je flottais qui resterait gravé dans mon esprit.
Merci Matatoune, on n’a pas à se plaindre. Bonne journée.
Cloud
sur 23 mars 2020 à 10h26
Sacrée expérience. Outre la piteuse allure en sortant de l’eau, je retiens ce sentiment de bien-être pendant l’immersion, alors que la vie même est en danger. Bien raconté.
Inspiré par une perte de conscience sous la douche alors que j’étais hospitalisée au CHU.
Mais bien sûr, l’eau était agréablement chaude 😉
Bonne journée.
Didi
sur 23 mars 2020 à 12h58
Je suis en retard …. Mais j’ai écrit hier ( sur mon carnet confinement) ces quelques mots venus depuis cette photo.
En apnée, oui en apnée
Sans inspirer
Sans Expirer
Flottement
Sans apesanteur
S’imprégner du liquide
Hydro- alcoolique
Rêver
S’adapter
Respiration liquide
Inspirer
Expirer
Flotter
Dans les nimbes amniotiques
De notre cocon protecteur
Bisous virtuels en espérant que vous soyez en forme malgré tout
Merci pour ce rendez-vous, réveillant la blogosphère qui semble bizarrement comme endormie…
Kroum
sur 23 mars 2020 à 13h41
Un joli texte qui nous amène petit à petit vers une respiration douce. Merci et bravo Didi !
Didi
sur 23 mars 2020 à 13h48
Oui réapprendre à respirer pour essayer de se détendre malgré tout !
Merci Kroum
Viviane Perez
sur 27 mars 2020 à 12h16
Comme un avion sans aile
Une mariée sans air…
Un sachet sans ficelles,
une liste à la Prévert
Ben quoi? Ca vous étonne?
c’est pourtant comme ça
On peut en faire des tonnes
Cœlacanthe
Allongée sur les vagues
La femme redevient poisson
Le poisson primitif
Qu’ils étaient tous
Avant de devenir humains
Pensants et réfléchis
Philosophes ou chirurgiens
Drogués ou alcooliques
Assassins ou victimes
Promoteurs ou dictateurs
Golden-boys ou filles-de-joie
Un cœlacanthe
Au corps de fossile
Au poumon ancestral
Et aux nageoires charnues
Prémices de leurs membres
Elle s’enfonce dans les profondeurs
Où la lumière s’éteint
Elle ne sait plus penser
Aux ravages causés par les siens
Sur cette terre
Elle ne réfléchit plus aux conséquences
De son « évolution »
Son cerveau s’est réduit
Bras et jambes s’atrophient
En de courts moignons recouverts d’écailles
Elle respire différemment, mais elle vit
Descendant au plus profond des abysses
Une seule conviction ancrée dans son instinct
Ne plus jamais refaire surface.
MH
Un texte terrible et si bien écrit. Bravo MH !
Merci beaucoup Kroum !
splach
Rewind! Très bien amené.
Très beau. Le texte est riche de sentiments et de mots bien choisis.
Merci beaucoup Cloud !!!!
terriblement bien tourné
Whaou, merci !!!
Tu peux venir te poser près de moi.
Je suis là, tu le sais.
Je ne résiste pas à entendre chaque jour ta voix,
mais nous voilà confinés,
toi, à 600km de moi.
Cette distance ne m’a jamais parue aussi éloignée.
Et pendant que je me soucie pour toi,
dans cette capitale polluée,
entre quatre murs sous ton toit,
moi, dans notre campagne, havre de paix,
la maison de ton enfance quoi,
je te vois évoluer avec grâce et agilité
là bas.
Ma fille, ma sirène, je me délecte de voir ta légèreté.
On dirait que tu lévites sans poids,
dans ce monde plein de gravité.
Merci mon enfant, j’aimerais être aussi libre que toi,
dans cette morosité.
Apprends moi comment tu fais.
On sent l’amour parental transparaître dans ce beau texte, j’aime beaucoup.
L’émotion et l’amour qui se dégagent de ce texte, dans l’ambiance que nous subissons tous, me touche beaucoup.
Belle ode à ta fille ♥ Kroum
Merci
Bel hommage à l’enfant éloignée et magnifique manière de lui communiquer ton amour.
elle a de la chance
C’est l’histoire d’une princèse qui s’appelait Rou. Son père été le roi est sa mère la rène.
Elle été trè maleureuse parce que son père et sa mer ne l’amé pa.
Alors elle allé dans le parc du chato et elle écouté les oizeau chanté surtou les pijon quel aimè bocou.
Elle auré bien voulu roucoulé come les pigon.
Une nui, elle s’endorma et une fée vena la voir pendan son somey. La fée lui disa que pour chanté come les pijon il falè mangé dé cayou. Sur le cou, Rou ne comprena pa mai elle fesa confiense à la fé et elle manga plin de cayou.
Mais elle ne chanté pa come les zoizo.
Alors elle u soif. Elle coura dan le parc du chato et se dirija ver le basin ou il y avé dé nénufar et dé canar.
Elle se bessa pour boir car les cayou pesè lour dans son ventr.
Et le poi dé cayou l’entrènère et ellé tonba danlo.
Elle n’avè jamè apri à nagé.
Alor…… la princèse Rou coula.
***********************************************
Je sors…
J’adore! Un beau pied de nez à la langue française sous cet « accent » enfantin 🙂
Adorable ! Avec un réalisme cruel qui donne beaucoup d’humour à ce texte. Bravo.
Sous l’eau
J’aime l’eau sous toutes ses formes: à boire, plate, gazeuse; à voir, ruisseau, torrent, barrage, rivière, fleuve, mer, océan, piscine; à la toucher, à y rentrer et à nager dès que je peux et même dans une eau que d’autres trouvent trop fraîche. Par contre, je n’aime pas trop avoir la tête sous l’eau, pas plus que nécessaire pour passer d’une ligne à l’autre à la piscine. Je t’ai souvent dit que j’aimerais faire de la plongée sous-marine mais c’est un peu incompatible avec ma claustrophobie.
22 mars 2020
Joli texte sur l’eau dont je ne suis pas adepte pourtant. Je lui préfère le vin et les prairies. Bravo Laura !
Je n’aime pas que l’eau, non plus
Bel hymne à l’eau
merci
Il y a suffisamment d’eau en surface pour ne pas être obligé de s’aventurer à l’intérieur…
Ca a l’air joli quand même
Quel fou rire..ce sidi, en arabe et en moi même car je parle les deux langues!! tu aurais pu éviter les quelques erreurs d’orthographe que j’ai cru voir!!
pour ceux qui se demandent de quoi on parle..nous sommes..de la même famille Amor fati et moi!!
Oui. Cé ma seur.
A l’eau
Allô
Tu es là ?
Confinée
Noyée
Plonger
Remonter
Allô
Tu es encore là ?
Respirer
Espérer
Allô
Merci d’être là.
Merci d’être là toi aussi.
Très astucieux. La communication nous sauve, c’est vrai.
E.T. téléphone maison. C’est vrai que les échanges sont plus importants que jamais et rassurants…
C’est haletant et bien martelé.
premier dimanche
Pole dance
ils m’ont dit,
Paule , danse !
J’ai été embauchée
pour danser
enroulée
lascivement
langoureusement,
autour d’un pole
dans une boîte de nuit.
Une boîte,
pas un aquarium,
pas déguisée en princesse
où est mon body rose ?
Mon truc en plumes ?
Ce beau mec brun
au regard vairon
ce nouvel artiste
enro(u)lé comme moi
ce soir
quel est son nom déjà ?
Kaa…
Aie confianccccccce 😉
Excellente idée. Et bien amenée.
Narcisse féminine voit son double essayer de s’agiter pour ne pas couler.
Quelle belle illustration de l’état dans lequel nous sommes ! Confiné dans cette matrice qu’est devenu notre foyer à essayer de ne pas céder à la peur de mourir. Ne pas céder aux mauvaises nouvelles. Ne pas céder aux vagues déferlantes qui vont nous ébranlées. Ne pas céder à l’inquiétude pour ceux chéris. Ne pas céder à la colère qui ronge aussi.
Rester digne et solide dans cette tourmente, même si le regard des autres manque. Alors sans lui, il y a soi. Pensons à la Princesse aux eaux dormantes !
vagabondageautourdesoi.com
On se rejoint un peu dans l’image, mais juste un peu 😉
Oui. Attendre sereinement. On en sortira plus fort.
(Suite du jour 5 du Corona)
Je m’appelle Marcel. Je suis marin, et suis marié avec une sirène. Nos vivons dans un petit coin du Pacifique à quelques centaines de mètres de fond dans une grotte modeste, mais coquette.
Pas facile aujourd’hui d’être confiné avec une sirène qui ne cherche qu’à prendre l’air. Cela dit, je la comprends. Moi, je m’adapte à cette situation insolite de confinement inédit. J’en profite pour relire Vingt Mille Lieues sous les Mers, Moby Dick, La Baleine Thébaïde,…
Mon histoire n’est pas banale, Si la mer est mon métier, seule sa surface était dans ma fiche de poste. Pourtant le seul attrait pour une sirène m’a été fatal. Tout le monde ne s’appelle pas Ulysse pour s’attacher à un mât afin d’éviter de succomber au charme. Non, moi j’ai craqué dans tous les sens du terme : je l’ai suivie, le bateau a dérivé, s’est fracassé contre un rocher, et je me suis laissé emmener pour le meilleur et le pire : un mariage au fond de la mer.
Aujourd’hui, pandémie oblige, nous sommes calfeutrés dans notre grotte sous-marine avec un stock de poissons et d’algues pour tenir des semaines. Je rêve à mon village de Cronalec, à ma maison, à mon bateau. Tandis que je regarde ma femme avec le même amour, je sculpte méticuleusement des chutes d’épaves trouvées ici ou là. Et sur le bois gorgé d’eau, je grave de mon burin qui ne m’a jamais quitté :« Souvenir de Cronalec sur Mer », surmonté d’une sirène enroulée.
Sous ses pieds, il y avait un miroir aux reflets bleutés.
Sous ses pieds, il y avait une fenêtre, un tapis de verre qui ne semblait exister que pour dire ce qui ne pouvait être dit.
Elle avait arpenté ces couloirs des centaines de fois, sans jamais remarquer ce qui gisait en dessous. Dans l’ancienne maison familière, aux poussières de mémoire, elle avait foulé le même sol mais jamais n’avait su voir sous les lattes de plomb.
Pourtant, cela avait toujours été là, sous ses pieds. Les bruits qu’elle entendait la nuit, quand elle sortait de sa chambre pour chercher un verre d’eau, et qu’elle prenait pour les chants d’une bête sauvage au loin. Ces cris qu’elle croyait percevoir le jour, perdus parmi les rires des enfants dans la cour.
Toute dans son enfermement / les murs encombrés des dessins des résidents – rien que le murs où se perdre, et pourtant…
Pourtant, aujourd’hui, alors qu’elle était revenue dans ces lieux oubliés, elle avait senti pour la première fois cet espace, cette présence en dessous.
Et elle avait compris, enfin, ce qui lui avait toujours échappé.
Des années, des décennies, qu’elle s’était perdue, qu’elle s’était noyée. Un regard vers la glace qu lui avait renvoyé son image : elle était restée là, conservée dans une eau glaciale dans les fondations même d’autrefois. Elle était restée là, intouchée, et le corps qui avait grandi et vécu plus tard, loin de l’institut, n’avait été jusqu’à ce jour qu’une marionnette, une peau morte secouée par les vents.
Ah l’amour! Il est attendrissant Marcel 🙂
original
Beaucoup d’amour se dégage de ton texte Cloud. Bravo !
(oups, pardon, c’est mon premier essai, j’ai posté au mauvais endroit…)
Ma participation se trouve également sur https://photonanie.com/2020/03/22/brick-a-book-3/ comme chaque semaine
J’avais probablement un peu trop bu pendant cette soirée magnifique au bord de la falaise quand j’ai basculé dans l’eau. Evidemment personne ne s’en est aperçu ou bien ils étaient trop saouls pour réagir.
Il faut dire qu’il y avait du monde ce soir-là et que les conversations allaient bon train.
Quoi qu’il en soit, dès que j’ai commencé à couler j’ai ressenti un bien-être incroyable. Les bruits me parvenaient totalement assourdis. Je flottais littéralement comme un bébé dans le liquide amniotique.
Des images abstraites ont envahi mon cerveau, un peu ramolli à ce moment il faut bien le reconnaître, mais elles me faisaient un bien fou tout en m’hypnotisant agréablement en même temps.
Je voyais bien quelques bulles remonter à la surface mais ça me faisait plutôt sourire en pensant à celles de tout ce champagne qui avait coulé le long de ma gorge.
J’ignore le temps qu’a duré l’incident mais quand même, à un moment, quelqu’un a vu flotter ma robe comme d’immenses nageoires translucides et s’en est inquiété.
Ce qui s’est passé ensuite est très confus dans mon esprit. On m’a raconté qu’un des serveurs avait plongé pour me remonter à la surface. Quelle chance qu’il n’ait pas été autorisé à boire pendant son service!
Autant avouer que j’avais piteuse allure quand on m’a sortie de l’eau, ma coiffure sophistiquée et ma robe collant à mon corps ne m’avantageaient pas vraiment. J’étais bien loin de la beauté altière qui avait attiré les regards flatteurs quand j’étais arrivée!
Je frissonnais malgré la couverture dans laquelle on m’avait enroulée.
Je me souviendrais longtemps de cette mésaventure mais, plus que tout, c’est le sentiment de bien-être immense quand je flottais qui resterait gravé dans mon esprit.
Bien être que je te souhaite encore en ces temps difficiles
Merci Matatoune, on n’a pas à se plaindre. Bonne journée.
Sacrée expérience. Outre la piteuse allure en sortant de l’eau, je retiens ce sentiment de bien-être pendant l’immersion, alors que la vie même est en danger. Bien raconté.
Inspiré par une perte de conscience sous la douche alors que j’étais hospitalisée au CHU.
Mais bien sûr, l’eau était agréablement chaude 😉
Bonne journée.
Je suis en retard …. Mais j’ai écrit hier ( sur mon carnet confinement) ces quelques mots venus depuis cette photo.
En apnée, oui en apnée
Sans inspirer
Sans Expirer
Flottement
Sans apesanteur
S’imprégner du liquide
Hydro- alcoolique
Rêver
S’adapter
Respiration liquide
Inspirer
Expirer
Flotter
Dans les nimbes amniotiques
De notre cocon protecteur
Bisous virtuels en espérant que vous soyez en forme malgré tout
Merci pour ce rendez-vous, réveillant la blogosphère qui semble bizarrement comme endormie…
Un joli texte qui nous amène petit à petit vers une respiration douce. Merci et bravo Didi !
Oui réapprendre à respirer pour essayer de se détendre malgré tout !
Merci Kroum
Comme un avion sans aile
Une mariée sans air…
Un sachet sans ficelles,
une liste à la Prévert
Ben quoi? Ca vous étonne?
c’est pourtant comme ça
On peut en faire des tonnes
C ‘est l absurde qui vaincra
Quoi qu’il en soit