Et nous revoici sur un site ! Il sera plus facile d’y déposer vos textes, ou vos liens !
L’idée est d’écrire un court texte inspiré de la photo ci-dessous. Je remercie Vincent Midolo de nous permettre d’utiliser sa photo. (Le copyright est à mettre sous la photo.)
Vous avez jusqu’à dimanche prochain pour écrire le texte.
A vos claviers !
– Le retour sans rivière –
L’ailleurs s’était lassé de lui. Ou bien un cycle s’achevait, ce qui était la même chose. Une terre mère l’attendait, dont il n’avait jamais oublié les couleurs, les nuances du ciel d’été, le parfum suave des pruniers. Jamais il n’avait lâché la dernière amarre. Il était pourtant parti loin. Qu’importait la course du monde, ses tourments et ses humeurs vagabondes : il avait sa rivière, et en elle tout son univers. Elle l’attendait. Son chez-lui. Du haut des tours, dans les avions, dans le secret de ses souvenirs il caressait ce porte-bonheur. Une onde. Claire, pure, joyeuse et sautillante, un chant léger comme les papillons qui pétillaient sur ses rives. Il l’appelait d’un clin d’oeil, et son écho lui parvenait au-delà des continents, des océans. Sa rivière avait la nostalgie des films anciens, une Marilyn sensuelle et dense, six cordes qui vibraient pour attendrir le western quotidien. « There is a river called the river of no return », et pourtant lui bientôt y retournerait et ne la quitterait plus jamais. On vendrait des milliards de canettes de soda, on produirait des tonnes de chimie, on brûlerait des forêts de plastique, la rivière demeurerait la dernière vérité. Inaliénable, et folle d’être si vraie.
Il était donc revenu. Un banc, une flaque, la laisse noire de l’eau perdue : voilà tout ce qu’il restait, et le métal tordu d’une boite de soda qui, elle, dans cent ans dirait encore « moi j’ai survécu ».
C’est superbe. J’aime beaucoup : « L’ailleurs s’était lassé de lui ». Ton texte donne envie de se laisser naviguer le plus longtemps possible dans les méandres de nos rêves et de nos illusions…
Avec le temps tout revient…
Le brouillard gris et humide a versé ses larmes sur ma région depuis des mois. Le sentier bucolique est devenu une rivière sans charme, le banc romantique qui acueillait si souvent mes pensées amoureuses a encore les pieds dans l’eau. Quant aux arbustes qui m’entourent, ils dressent leurs rameaux dépeuplés comme les fantômes anorexiques d’une existence jadis foisonnante.
Heureusement il y a peu un accord a enfin été trouvé au Ministère des Affaires du Temps qu’il fait et du Temps qui Passe. Les escargots et les blés, les hérons et les vignes se sont entendus après des semaines de discussion. Il a été décidé que, dans un premier temps, le ciel bleu serait garanti trois jours par mois sur l’ensemble du pays. Ce n’est pas grand chose, mais c’est déjà un progrès.
Aujourd’hui le soleil est revenu. Il caresse ma peau, je caresse ses rayons. Les ombres dessinent un relief longtemps oublié. Il fait beau, l’harmonie reprend ses droits. Le monde n’est pas encore sec, mon coeur non plus.
Ce matin, j’ai envie de chanter les caprices du temps qu’il fait et de celui qui passe, se jouant de mes humeurs sans jamais cesser de les renouveler.
J’aime ton univers et ce ministère du temps … quelle belle trouvaille !
La moindre étincelle
Rase un quartier complet et
Embrasse un feu de réactions…
Un ouragan
Peut balayer une île
Et réduire à néant des vies…
Sécheresse, inondations,
Tremblement, tempête,
La Terre nous crier son désespoir…
Combien de temps nous faudra-t-il
Pour l’entendre
Et enfin réagir ?
Car, si belle soit-elle,
C’est à nous de la préserver
Et de protéger sa nature.
Triste constat bien exprimé. Tu as raison : chacun a sa part, individuellement et collectivement, dans ses responsabilités et dans ses actions.
A quand?
Pierre qui roule
n’amasse pas mousse
canette qui coule
n’a pas d’avenir.
Sortir du moule
emportée par la foule
de ses congénères
échouées là comme toi
le long de tous les cours
d’eau du monde,
immondices éparpillés
au gré des balades humaines
houle saoule de sodas sucrés
détritus indestructibles,
irréductibles déchets
unis au large des océans
le 6eme ou 7eme continent !
tout augmente !
Sauf ton débit,
pauvre petit ru
incapable de pousser plus loin
la moindre ordure
qui stagne en embâcle,
minuscule portion d’un futur barrage
créé par la main de l’homme
assassine et meurtrière
en pensée, en parole,
par action et par omission.
A quand la demande de pardon
à l’échelle mondiale
à quand la prise de conscience
nécessaire et indispensable
à quand une action organisée
pour la sauver
notre planète.
A jamais notre Terre.
Bravo. Ton poème est très beau, tant par le fond que par la forme. L’absence de ponctuation m’a emmené de ligne en ligne au milieu de tes mots forts pour constater, comme toi, les désastres que l’espèce humaine, dont je fais partie, a créés.
C’est mon banc, un petit banc de bois, certes un peu biscornu, la mousse s’y est accrochée au fil des ans, les planches ont gauchi. Depuis quelque temps, à chaque grosse pluie, la rivière déborde et laisse en souvenir une belle flaque. Mais même les pieds dans l’eau, mon banc et moi, nous résistons.
Mon banc fait face à un petit bois, le bois des Oubliés. Je ne sais pas pourquoi il est nommé ainsi, j’ai toujours trouvé étrange qu’il puisse exister près de moi une forêt de gens dont personne ne voudrait se souvenir. Qu’avaient-ils pu bien faire pour être ainsi gommés de nos vies ? Cela me chagrinait.
Un jour où j’étais assis sur mon banc, j’ai commencé à leur parler, un peu timide au départ, je ne les connaissais pas. Je gardais une certaine réserve, je ne voulais pas m’immiscer. Désormais je viens tous les jours et, même les pieds dans l’eau, je discute. Chacun a son histoire, ses souvenirs, parfois intarissables comme s’ils voulaient rattraper le temps perdu. Moi, j’écoute, j’emmagasine, j’enregistre et quand je rentre chez moi, c’est comme si je les emmenais.
Alors, vous voyez ce banc, ce ne sont pas de simples planches de bois, c’est toute ma vie. Ou plutôt toutes nos vies. D’ailleurs si vous le regardez bien, vous apercevrez une petite plaque de laiton. Je l’ai fixée derrière, j’aime qu’elle soit discrète. J’y ai fait graver une simple phrase, histoire qu’on ne nous oublie pas. « En souvenir d’Adrien et de toutes les rencontres qu’il fit ici. »
C’est beau, plein de mélancolie. Ton texte montre un respect pour les « oubliés », « oubliés » par la seule terminologie donnée par Dieu sait qui à un bois, peut-être justement pour qu’on ne les oublie pas. Bel hommage à Adrien et aux multiples rencontres qui enrichissent l’existence.