Atelier d’écriture 352

par | 7 Déc 2019 | Atelier d’écriture, Livres pour adultes | 134 commentaires

© Gemma Evans

134 Commentaires

  1. janickmm

    Bonjour à tous, voici mon texte épinglé avec la photo de la semaine https://janickmm.wordpress.com/2019/12/08/chateau-des-orangeraies/

    Château des orangeraies
    La Tisannery Bleue
    06424 Tour-En-Joué
    Gabriel Souverain-Bien
    1, rue de la Harpe
    35400 Saint-Malo
    Cher Vous,

    L’habitude que nous avions de nous embrasser du bout des lèvres et de nous rencontrer une fois par jour, tout au plus, sur le palier, en nous frôlant, comme pour éviter le contact avec un porteur de VIH comme si cela pouvait nous contaminer sur le champs, m’a saisie d’effroi, hier soir, en tentant de m’endormir.

    J’ai donc quitté la maison tôt, selon un savant calcul, pour éviter soigneusement votre frôlement de l’aube. Mes draps seront peut-être encore chauds et remplis de mon odeur lorsque vous lirez ces lignes ; j’ai aussi besoin d’employer le « vous », pour m’adresser à votre personne, ce qui me laisse un petit espace de liberté, un petit ravin broussailleux, un intervalle de protection, avant de vous atteindre par mes mots.

    Dans le pli, j’ai glissé la photo du lieu où je séjourne, sans vous, depuis trois jours. Seule, rassurez-vous. Car il est encore concevable de vous dire « je t’aime ».

    Ceux sont juste vos passages épisodiques et votre air distant qui m’ont fait fuir. Comme il est difficile de se sentir ignorer par l’être aimé. De penser que l’on est transparent.

    Je prie Dieu de me transformer en vampire, ainsi je pourrais me nourrir de vous, abuser de vous, à vos dépens. Mais Dieu, ce vieil être, a du décrocher ses prothèses auditives et les égarer un jour de surmenage.

    Les fleurs d’orangers et de citronniers distillent leur parfum subtil sous cette véranda. Le propriétaire des lieux est un agrumiculteur passionné. Ce soir il cuisine des lentilles belugas à la saucisse de Montbéliard, la vraie, il m’affirme qu’en 2018, 34 millions de ces saucisses ont été consommées, suivies de son indéfectible tisane à la fleur d’oranger, relaxante, rassurante, céleste, même. La bienveillance me répare. Tiens ? Cela vous fait sourire … C’est tant mieux. Voyez, je vous informe même de menus détails, inintéressants.

    Me manquez-vous ? M’aimez-vous ? Mes questions s’égarent, s’évaporent, je ne cherche pas de réponse, je me laisse vivre voluptueusement bercée, choyée, chouchoutée, j’en profite, je thésaurise … M’embrassez-vous ? Me lisez-vous, à travers mes mots ?

    Bien à Vous,

    P.S. Si une réponse écrite vous effleure, tenez-moi au courant au sujet des prothèses divines ?

    • Laurence Délis

      Les prothèses auditives ne sont plus ce qu’elles étaient ! 😉
      j’ai bien aimé le ton à la fois suranné et désabusé, il met en valeur la touche d’humour :). Bravo janickmm

      • janickmm

        Merci Laurence,, c’est vrai, le temps employé est comme tu le décris, pas mal de désillusions, sauf les prothèses ! ah ah !!

    • Marlabis

      J’ai bien cru que nous étions dans un autre temps… Ton texte est agréable à lire .

      • janickmm

        écrire sur papier, entretenir une réelle correspondance par lettres manuscrites n’est plus vraiment d’actualité, mais, moi, j’adore encore le faire !

    • laura

      J’admire un style dont je ne suis pas capable

      • janickmm

        C’est sans réfléchir, Laura, cela vient tout seul, mon seul petit secret est que j’aime être bercé par les mots, parfois je raconte les petites aventures de la journée, le soir à mon compagnon, et cela l’endort, pffff, excellent !

    • Nour

      J’adore ! Surtout l’odeur restée dans les draps…texte à a fois sensuel, physique et très lucide à la fois !

      • janickmm

        Un constat qui mène à un besoin de réflexionl, en pleine nature, bien entouré, merci à toi

    • Séverine Baaziz

      Un vouvoiement d’un charme fou ! Et que de subtilités dans la tonalité. Bravo, janickmm !

      • janickmm

        Merci Séverine, cela fait un peu aristo, mais parfois c’est utile, de vouvoyer, cela invoque une marque de respect.

    • Photonanie

      Un texte tout en nuances sensuelles et drôles à la fois. J’aime beaucoup.

      • janickmm

        Un couple qui se frôle chaque jour, sans se rendre compte qu’il y a encore de l’amour, de la sensualité.

    • marinadedhistoires

      C’est beau et fin, le drame de l’amour non partagé …

      • janickmm

        Drame dû à l’incompréhension, à la routine quotidienne en oubliant de surprendre, de faire des petites surprises ;;; merci à toi

  2. francoise

    Bonjour à tous,
    avant de partir chez des amis,
    la réflexion de la nuit
    aidée par Pierrot
    mon pote , mon poteau

    Ouvrez ouvrez la porte aux humains
    regardez les s’ennuyer c’est triste,
    les artistes, auteurs et autrices
    si vous voyez un humain prisonnier
    ouvrez lui la porte vers la liberté

    Un ptit appart
    composé de quelques pièces
    le balcon devant
    donnant sur un carré vert
    au printemps,
    cramé en été
    et râpé en hiver
    c’est le rêve des ruraux
    vous diront les hipsters
    les parigots, les bobos
    qui eux rêvent de grand air

    Ouvrez ouvrez la porte aux humains
    regardez les s’ennuyer c’est triste,
    les artistes, auteurs et autrices
    si vous voyez un humain désespéré
    ouvrez lui la porte vers la liberté

    Aidez les à prendre la route avec Jack
    à rencontrer Zazie
    dans le métro ou ailleurs
    à courir le guilledou avec Harlequin
    à devenir otage avec Elie
    à réparer avec Colombe
    ou à voir la mer avec Julie
    rencontrer un bon musulman avec Tahmina
    ou découvrir les matins de Jenine
    chaussés d’italiennes avec Henning
    ou d’avaler la purge de Sofia

    Ouvrez ouvrez la porte aux humains
    regardez les s’ennuyer c’est triste,
    les artistes, auteurs et autrices
    si vous voyez un humain inconsolé
    ouvrez lui la porte vers la liberté

    car
    Sauve toi , la vie t’appelle, Boris
    Les mères juives ne meurent jamais, Nathalie
    Assommons les pauvres, shumona
    Un homme ça ne pleure pas, Faiza
    Dans le grand cercle du monde , Joseph
    Pour quelques milliards et une roupie,Vikas
    Le roi disait que j’étais le diable , Clara
    tout cela
    serait Lettres mortes , Robert
    pour n’oublier jamais l’étranger
    la maison aux sept femmes
    les enfants du jacaranda
    le collier rouge ou la veuve blanche
    l’étrangère ou la triomphante,
    toutes des sorcières
    la fille aux sept noms
    tiens encore sept..

    Ouvrez ouvrez la porte aux humains
    regardez les s’ennuyer c’est triste,
    les artistes, auteurs et autrices
    si vous voyez un humain ensorcelé
    ouvrez lui la porte vers la liberté
    demandez moi d’autres titres
    j’en ai encore des kilomètres
    ceux là datent de 2015

    • Nour

      Belle reprise de cette vielle chanson. Et ouverture au monde multi*, une petite note pour la tamina que je prépare de temps en temps, miam !

  3. Francoise Clamens

    Bonjour à tous
    réflexion de la nuit
    aidée par Pierrot
    mon poteau

    Ouvrez ouvrez la porte aux humains
    regardez les s’ennuyer c’est triste,
    les artistes, auteurs et autrices
    si vous voyez un humain prisonnier
    ouvrez lui la porte vers la liberté

    Un ptit appart
    composé de quelques pièces
    le balcon devant
    donnant sur un carré vert
    au printemps,
    cramé en été
    et râpé en hiver
    c’est le rêve des ruraux
    vous diront les hipsters
    les parigots, les bobos
    qui eux rêvent de grand air

    Ouvrez ouvrez la porte aux humains
    regardez les s’ennuyer c’est triste,
    les artistes, auteurs et autrices
    si vous voyez un humain désespéré
    ouvrez lui la porte vers la liberté

    Aidez les à prendre la route avec Jack
    à rencontrer Zazie
    dans le métro ou ailleurs
    à courir le guilledou avec Harlequin
    à devenir otage avec Elie
    à réparer avec Colombe
    ou à voir la mer avec Julie
    rencontrer un bon musulman avec Tahmina
    ou découvrir les matins de Jenine
    chaussés d’italiennes avec Henning
    ou d’avaler la purge de Sofia

    Ouvrez ouvrez la porte aux humains
    regardez les s’ennuyer c’est triste,
    les artistes, auteurs et autrices
    si vous voyez un humain inconsolé
    ouvrez lui la porte vers la liberté

    car
    Sauve toi , la vie t’appelle, Boris
    Les mères juives ne meurent jamais, Nathalie
    Assommons les pauvres , shumona
    Un homme ça ne pleure pas, Faiza
    Dans le grand cercle du monde , Joseph
    Pour quelques milliards et une roupie,Vikas
    Le roi disait que j’étais le diable , Clara
    tout cela
    serait Lettres mortes , Robert
    pour n’oublier jamais l’étranger
    la maison aux sept femmes
    les enfants du jacaranda
    le collier rouge ou la veuve blanche
    l’étrangère ou la triomphante,
    toutes des sorcières
    la fille aux sept noms
    tiens encore sept..

    Ouvrez ouvrez la porte aux humains
    regardez les s’ennuyer c’est triste,
    les artistes, auteurs et autrices
    si vous voyez un humain ensorcelé
    ouvrez lui la porte vers la liberté
    demandez moi d’autres titres
    j’en ai encore des kilomètres
    ceux là datent de 2015

    • Kroum

      Il est super ton texte avec toutes ces références ! Bravo Françoise Clamens !

    • Jen

      Super françoise! J’adore!

    • Laurence Délis

      En te lisant j’avais l’air de la chanson en tête et si je ne connais pas toutes les réf citées, le rythme rend la ballade attrayante. Belle performance 🙂

    • laura

      Quand pourrais-je réécrire de telles choses?

    • Nour

      Belle reprise de cette vielle chanson. Et ouverture au monde multi*, une petite note pour la tamina que je prépare de temps en temps, miam !

    • Séverine Baaziz

      Jolie performance des plus chantantes !

    • Photonanie

      C’est vrai qu’on chantonne en lisant ce texte aux nombreuses références dont certaines se sont échappées devant moi par la porte ouverte…

    • janickmm

      Chantons ! c’est bon pour le moral, mais je ne suis pas sûre de me souvenir de toutes les références, impressionnant !

  4. Marlabis

    Voici mon texte que vous pouvez également trouver sur mon blog
    https://lesempreintesdutemps.wordpress.com/?p=867

    L’aube arrive… Il va me falloir m’effacer avant que les premiers rayons du soleil inondent le hall de l’orangerie. J’ai attendu toute la nuit, mais ils ne sont pas revenus. Depuis leur dernière intrusion dans le château, je suis comme chamboulée. L’un d’eux m’a effleurée sans même sans rendre compte. Mais pour la première fois en plus de 150 ans, j’ai ressenti comme de la chaleur dans ma poitrine. J’ai eu cette impression de vivre ! Est-ce possible ?

    Contrairement à d’autres explorateurs, eux, ils étaient précautionneux et respectueux des lieux. Affublés d’étranges petites lampes sur leur front, ils déambulaient dans la bâtisse, photographiant objets, tentures, tableaux et s’attardant sur la béance due à ce terrible incendie. Incendie qui avait détruit une partie des communs, les 3/4 du premier étage dont la chambre où je reposais. En quelques minutes, les flammes étaient venues à bout de l’avenir d’une jeune femme de 19 ans.

    Je ne sais toujours pas pourquoi je suis restée prisonnière de cette frontière entre la vie et la mort, mais j’aimerais tant que cela cesse !

    Ils sont revenus plusieurs nuits d’affilée et la dernière fois, j’ai déployé tous les moyens pour communiquer avec eux : claquement de portes, déplacement d’objets, grincements de parquets… Le risque majeur était de les effrayer et de les perdre à jamais, mais j’avais tant besoin de leur « crier » ma rage ! Et puis, j’ai remarqué son regard quand il a croisé le mien sur ce tableau où Manet, un ami de la famille avait peint mon portrait !

    ( pour voir le tableau, il faut aller sur mon blog !)

    J’y ai vu de la curiosité, de l’attirance pour cette inconnue brulée vive… J’ai ressenti les questionnements, son besoin d’en savoir plus sur qui j’étais, qui je suis… J’ai remarqué aussi la buée dans ses yeux quand j’ai malencontreusement décroché mon portrait alors qu’ils quittaient les lieux.

    Je ne crois pas qu’ils reviendront. Mais je sais que l’urbex est en vogue et que probablement d’autres explorateurs viendront fouiner dans ce manoir. J’espère que certains, moins farouches, s’attarderont et sauront enfin me libérer de l’emprise du temps.

    • LAURA

      QUEL SOUFFLE§

    • Nour

      Belle histoire entre la vie et l’au delà, tu auris du essayer internet…pour les contacter…

      • Marlabis

        Pas certaine qu’il y ait du wifi dans ce manoir ! 😉

    • Séverine Baaziz

      Mais oui, l’image me soufflait aussi l’idée d’âmes prisonnières, et puis l’idée a filé… et j’aime beaucoup ce que tu en as fait. C’est bien raconté. Troublant. On y est ! Bravo, Marlabis !

      • Marlabis

        Merci beaucoup Séverine !

    • Photonanie

      J’aime bien cet entre deux mondes en me demandant si un beau jeune homme arrivera à faire basculer cette jeune femme du bon côté…

      • Marlabis

        Ce serait formidable pour elle… Revenir à la vie !

    • janickmm

      Un point de vue surprenant qui me donne des frissons, m’enfin, quel spectacle ! il s’en passe des choses dans les bâtisses abandonnées.

  5. Séverine Baaziz

    (Bonne soirée, lundi, et semaine à tous !)

    J’ai grandi dans les soutiens-gorge. Les dentelles, les fines et larges bretelles, les balconnets, les pigeonnants, les bandeaux, les triangles et les push-up. A agrafer sur le devant, sur les côtés ou, plus classique, à l’arrière. Et pour le petit garçon que j’étais, être entouré de toutes ces joliesses, c’était comme être l’invité d’honneur d’un monde interdit aux enfants. Un monde fait de choses inavouables.
    Les culottes, elles, ne me faisaient pas grand effet, je me doutais bien, malgré mon jeune âge, qu’elles avaient le même rôle que mes propres slips : dissimuler la machinerie à faire pipi. Mais les soutiens-gorge, ça, c’était quelque chose. Quelque chose qui disait que les filles étaient différentes, une différence tout en rondeurs. La poitrine. Rien que de prononcer ce simple mot, là, au milieu de la boutique de lingerie de maman, encore aujourd’hui, j’en rougis.
    Probablement, tout cela a-t-il participé à ma timidité. Je n’osais, pour ainsi dire jamais, regarder les clientes dans les yeux, parce que les yeux, quand on y pense, ce n’est pas bien loin du décolleté. Alors, je parlais à leurs mains. Cela me convenait davantage. Mais, bien souvent, ma timidité était mise à rude épreuve. Au loin, quand une dame en cabine criait “jeune homme !”, invariablement, les gouttelettes sur mon front commençaient à perler. Maman me collait alors une bise sur le front, de celles qui mettent un petit coup de pied aux fesses en douceur, et là, je n’avais plus vraiment le choix. Je filais, avec mon air ridicule, vers la cliente en détresse et, dès que le rideau de la cabine s’ouvrait, je fermais les yeux, tendais le bras, et récupérais l’article à changer sans pouvoir me défaire de mes joues roses. La timidité, c’était vraiment un truc embarrassant.

    C’est dans ma vingt-deuxième année que ma vie fut bouleversée. Ma vie et celle qui ne m’avait jamais quitté : ma tendance à préférer les mains aux regards.
    Je me souviens encore de l’heure.
    19h18.
    Dans la boutique tout juste fermée, tandis que je mettais un peu d’ordre, que je délestais les cabines des pièces abandonnées sur cintres ou au sol, derrière un rideau, à plat sur un banc, je vis une lettre. A mon intention. Aucun doute possible puisque “le fils de la patronne”, c’était moi. Une enveloppe parfumée. Je tombai sur un pouf. Je décachetai le rebord adhésif. Et je lus. D’un trait.
    Des mots qui parlaient d’amour. Des mots qui parlaient de moi. Moi, le vendeur de soutiens-gorge aux grandes et envoûtantes pupilles noires, aux mains délicates, aux cheveux en colère et à la peau boisée.
    Le lendemain, une autre lettre. Et le surlendemain. Et les douze jours qui ont suivi.
    Autant vous le dire sans détour, dès les premières syllabes, je suis tombé amoureux. Des mots pareils, ça m’a tourné le coeur dans tous les sens.
    Et puis, un jour, une lettre m’a donné rendez-vous.
    A minuit pile, au jardin des plantes, sous la serre tropicale.
    Je n’ai pas pu faire autrement que d’y aller. Les sentiments plein la tête, les pieds, les jambes et tout le reste, mais j’y suis allé.
    Dans le clair-obscur de la verrière éclairée à la blancheur de la lune, je me suis avancé. Au loin, je l’apercevais. Une silhouette adossée au plus grand palmier. Je me suis approché encore jusqu’à pouvoir sentir le parfum de ses cheveux, sur sa joue j’ai posé ma main, sur mon torse elle a posé la sienne.
    Et soudain, dans un bruit de tonnerre, du pire tonnerre de tous les tonnerres de tous les temps, armé d’une lampe de poche, le gardien de nuit est entré.

    • Marlabis

      J’adore ! Les émois de cet enfant, devenu adulte au milieu des dentelles et de ces femmes sans doute pas aussi naïves qu’elles voudraient le laisser croire ! Et la chute ! Bravo !

      • Séverine Baaziz

        Merci, Marlabis !
        (J’aurais bien aimé fignoler encore le texte, mais le temps me manquait un peu.)

    • Laurence Délis

      J’aime bien comment tu t’appropries la photo, on ne sait jamais où tu vas aller et c’est à chaque fois délicieux à lire 🙂

      • Séverine Baaziz

        Merci beaucoup, Laurence Délis ! Je crois que c’est ce qui m’amuse le plus dans l’écriture : les chemins originaux 😉

    • LAURA

      DES MOTS à l’amour?

      • Séverine Baaziz

        Tout à fait, Laura ! J’avais envie de l’histoire d’un homme qui tombe amoureux de lettres. Des mots à l’amour, délivrant de la timidité. Belle journée !

    • Nour

      Super texte, au début, l’ambiance ressemble à « Au bonheur des dames ». Belle tension que ces lettre et la rencontre, et ce $+*%&? de jardinier, une suite… »Le jardinier disparu, enterré dans cette serre géante, servant d’engrais aux massifs de rosiers…. »

      • Séverine Baaziz

        Je sais, l’idée du gardien de nuit est perfide. Mais, j’assume. A chacun d’écrire la suite 😉 Merci pour ton superbe commentaire, Nour !

    • Photonanie

      J’aime beaucoup cette ambiance toute en dentelle et ce jeune homme timide à l’excès est bien attendrissant.

    • marinadedhistoires

      Comme c’est romantique cette rencontre dans la serre ! Tu décris extrêmement bien la timidité et la fascination du petit garçon envers la clientèle de la boutique.

      • Séverine Baaziz

        Merci, marinadedhistoires ! L’image m’a donné l’humeur romantique, et puis, en passant par ma salle de bain, je suis tombée sur mes soutiens-gorge… 😉

        • marinadedhistoires

          Trop drôle la façon dont vient l’inspiration, parfois 🙂

    • Ulysse

      bien vu, avec une belle chute.

    • janickmm

      Une belle enfance et adolescence, dans la dentelle et la courtoisie, l’apprentissage de la vie auprès d’une maman délicate, naissance aussi d’une belle passion, et puis … la chute, mais d’où vient-il ce gardien , Quoi ?

      • Séverine Baaziz

        Un personnage masculin dans un monde féminin, l’idée me plaisait bien. Et j’avoue que dans ma première version « mentale » du texte, la fin était plus croustillante, et puis, j’ai coupé 😉 Merci pour ton commentaire, janickmm !

        • janickmm

          ah ! ah ! j’aimerai bien avoir la suite, ou le moment coupé, interessant !

  6. Nour

    La tentation

    Ce matin là, debout au milieu de cette allée
    Une hallucination soudaine m’envahis l’espace d’un instant
    Effleurant du regard ce mirage pourtant si réel et tentant
    Je passe, détournant mon regard de ce fruit défendu et passé

    Séance d’épilation de tous ces souvenirs uns à uns
    Sans rendez-vous, comme ils viennent
    Arrachés avec leur racine sans douleur ni dédain
    Pour que jamais ils ne reviennent

    Ce même soir, assis à cette table, j’écosse chaque chardon
    Ôtant chaque épine avec délicatesse et pardon
    Ma mémoire libérée, devenue lisse
    Effacement indélébile, pour que jamais rien ne resurgisse

    Derrière cette porte, le jardin de la tentation, mythe révolu
    Je termine cette bière ambrée sans mélancolie
    Quel leurre est-tu ?
    Il est hier, le temps de l’oubli

    Inspiration : Atelier d’écriture 352
    Photo : © Gemma Evans

    Musique :Lisa Ekdahl & Ane Brun – When
    https://www.youtube.com/watch?v=rtd1xbODZfk

      • Marlabis

        La mémoire libérée, lisse, n’appelle-t-elle pas au retour de ces souvenirs si bien pincetés ?

        • Nour

          L’idée est de les enlever avec la racine…Nietzsche appel à l’oubli en faveur du présent…

    • Laurence Délis

      La tentation dans le flot de souvenirs qui resurgit et en finalité la paix retrouvée…J’ai particulièrement apprécié la dernière strophe

      • Nour

        La tentation est bien dans le présent du réel et oublier qu’on a oublié…

    • Photonanie

      Pas mal du tout cette épilation des souvenirs, oserai-je dire que c’est au poil?

      • Nour

        Merci Photonanie, oui une épilation définitive

    • marinadedhistoires

      Un poème pas facile à commenter , mais juste beau.

      • Nour

        Merci MH. C’est vrai qu’il n’y a que des métaphores…

    • janickmm

      L’appel à l’oubli en faveur du présent (Nietzsche), je serais plus nuancée, je préfère dire que certains souvenirs s’estompent, mais il me semble que les oublier est plus difficiles, quel boulot ! « Ôtant chaque épine avec délicatesse et pardon » c’est beau ! cela donne une belle image, une belle représentation de la difficulté à oublier. Merci à toi !

      • Nour

        Tu as certainement raison sur la radicalité de l’oubli, la prise de distance reste le seule moyen de s’en approcher et de recommencer à vivre autre chose et aussi de rester collé à la réalité au delà des fantasmes. Merci pour ton retour avisé !

  7. Kroum

    Á toi, l’âme jumelle que mon amoureuse n’a jamais oubliée,

    Cette lettre te parviendra peut-être un jour ; elle connait ton adresse mais refuse de me la donner.
    Tu vis et tu ne réponds pas à ses messages. 6 de ses lettres ont rencontré 6 silences. Pour la septième je prends la plume. Ne t’inquiète pas, je n’ai aucun grief contre toi ; tu fais partie de son passé, je suis son présent mais il lui arrive parfois de te faire resurgir dans notre quotidien, comme ce jour de visite de cette demeure en banlieue très éloignée, en un dimanche après-midi d’automne.

    Elle ne m’avait pas dit qu’elle connaissait cet endroit. Elle m’avait caché qu’elle y venait souvent s’y promener avec toi.

    C’est plusieurs jours après notre visite en famille qu’elle me montra ce cliché qu’elle prit de nous au retour de son tour en solitaire dans les allées spacieuses et baignées de nature. Je l’avais sentie mélancolique ce dimanche-là, sans en connaître vraiment la raison ; on célébrait un anniversaire, on était réuni en famille, son frère était présent. Mais tu dois le savoir, la nostalgie ça va, ça vient et tous les deux vous aviez trouvé le moyen de vous en défaire en vous isolant pour la faire se dissiper au plus vite. C’est ce qu’elle m’a dit au début de notre rencontre ; elle ne voulait pas que je m’offusque de ses besoins de retrait parfois et comme ça a marché entre vous, elle a voulu continuer. Comme tu peux t’en rendre compte, dès le début elle m’a parlé de toi en m’assurant tout de même que tout était bien fini. Mais telle une encre indélébile, tu es resté gravé en elle, et pour cause !

    Puis elle m’a raconté ce jour où elle avait voulu t’annoncer une grande nouvelle mais tout en toi l’a empêché d’aller jusqu’au bout de son aveu. Elle avait mis sa jolie robe courte ce jour là, celle qui découvrait ses jambes que tu aimais regarder et certainement toucher. Mais sans savoir pourquoi, ton regard fut empli de mépris sur son effort vestimentaire qu’elle fit juste pour toi ; ta bouche de son côté, s’efforçait de lui faire comprendre que d’autres jambes avaient désormais ta préférence et ce n’ était pas ce qu’il manquait autour de toi. Drôle de façon de dire les choses !

    Elle a alors choisi d’écourter vos retrouvailles dans ce jardin très vert. Il lui fallait s’éloigner pour avaler cette boule qui était restée bloquée dans sa gorge subitement.
    Aujourd’hui ce blocage est parti, je suis là, bien présent dans sa vie et je veille sur ta fille. Elle est là, de dos à ma droite sur le cliché. On fêtait ce jour là ses 7 ans. C’est cette nouvelle qu’elle avait voulu t’annoncer sur ce banc public il y a fort longtemps.

    • Marlabis

      Comme si la mélancolie de cette femme était devenue contagieuse… Ton texte est magnifique !

    • Nour

      De lettres, des mots, une histoire tortueuse pour le dire, je crois que cette fois la lettre va arriver…

    • Photonanie

      C’est vrai que parfois les souvenirs, même douloureux, peinent à s’effacer… mais la vie a gagné et c’est le principal. L’amoureux a pu « prendre un enfant par la main, pour l’emmener vers demain… »

    • marinadedhistoires

      De beaux personnages romanesques pour cette histoire de vie.

    • Jen

      J’ai écrit un premier commentaire qui n’a manifestement pas été enregistré. j’ai trouvé ce texte très poignant. Si l’histoire n’est pas réel on s’y croirait énormément et si elle est réelle c’est beau de prendre soin de l’enfant d’un autre encore plus fort de l’aimer. Ce n’est pas donner à tout le monde!

    • Laurence Délis

      Oh, superbe ! Je suis entrée dans l’histoire dès les premières lignes. La fluidité de l’écriture et le ton donné renforce la beauté de ton texte. Bravo Kroum.

    • janickmm

      Toi aussi tu as écris un courrier, besoin de s’exprimer, de tout déballer, ici, comme un reproche, une réprobation, un non-dit qu’enfin on peut libérer, soulagé.

  8. marinadedhistoires

    Voici mon texte chez moi, ou bien ci dessous. https://marinadedhistoires.wordpress.com/2019/12/09/le-tunnel-de-verdure/

    Le tunnel de verdure

    Le tunnel de verdure s’étirait sur plusieurs mètres. De part et d’autre, la rivière se scindait pour l’enlacer de ses deux bras turbulents et rapides. Sur le ponton de bois, au seuil de cette galerie végétale, se tenait Luc.

    Le « Mythe du retour » disait que quiconque passerait sous les palmes du tunnel, retournerait vingt années en arrière. Personne n’en savait plus. Les évènements seraient-ils modifiables, ou bien était-on condamné à revivre exactement les mêmes choses sans avoir sur elles la moindre prise ? Luc hésitait. Il venait d’avoir trente-huit ans. Repartir à zéro depuis l’année de son baccalauréat, choisir la fac de lettres au lieu de la médecine que son père lui avait imposée, se laisser pousser les cheveux jusque dans le bas du dos, passer toutes ses nuits dans les boites, à danser et à boire du gin-fizz, ne pas épouser Jeanne-Marie, oui, surtout cela, ne pas épouser Jeanne-Marie !
    Mais si rien n’était transformable ? Vingt années de plus à revivre ce gâchis… ces soirées interminables à étudier tous les os du corps humain, cette jeunesse sacrifiée à la volonté de son géniteur, mais pire que tout, vingt ans de plus à supporter Jeanne-Marie. Jeanne-Marie et ses petits yeux de raie, Jeanne-Marie et son nez à regarder péter les anges, Jeanne-Marie et sa bouche en forme de triste parenthèse, Jeanne-Marie et ses foulard Hermès, Jeanne-Marie et ses Je vous salue Marie, Jeanne-Marie et ses : « Allons Luc, un peu d’ambition ! »
    Luc se pencha en avant pour tenter de voir le bout du tunnel. S’il apercevait quelqu’un, il trouverait peut-être le moyen de contourner à la nage pour aller lui parler, lui demander s’il avait pu changer le cours de son existence… Malheureusement, on ne voyait qu’une porte, une grande porte de vitres et de fer, et personne à proximité.
    Alors, le regard de Luc se concentra sur les deux bras de la rivière. Le courant était aussi violent d’un côté que de l’autre et charriait toutes sortes de débris, morceaux de bois, fleurs coupées, roseaux déracinés. Oserait-il sauter ?
    Il trempa la main dans l’eau. Glaciale. Mais sa curiosité était la plus forte et il commença à se dévêtir sur le petit ponton de bois. Quand il fut entièrement nu, il avança ses deux pieds à la limite du caillebotis, prêt à plonger. C’est alors qu’il distingua une forme fluide et colorée qui dévalait le courant. Un carré de soie rouge orné d’un cheval turc ! Se pouvait-il que Jeanne-Marie ait voulu, elle aussi, découvrir le mystère du tunnel de verdure ? S’était-elle noyée dans les rapides ? Avait-elle, tout comme lui, espéré ne pas revivre leurs vingt longues années de mariage ? Luc imaginait une Jeanne-Marie radieuse, aux côtés d’un praticien de renom. Elle organiserait des dîners prestigieux pour d’éminents chirurgiens esthétiques, loin, bien loin du milieu étriqué de son petit généraliste d’époux… Quand tout à coup, son esprit fut ramené à la réalité par un halètement sonore et la vue d’un corps nageant avec peine à contre-courant. Jeanne-Marie !! Luc s’allongea sur le ponton pour tendre la main à sa femme qui luttait contre la noyade. Sa robe bleue plaquée contre son corps tremblant, Jeanne-Marie réussit à s’extirper des eaux et se serra de toutes ses forces contre son mari : « Je sais tout, mon chéri, j’ai parlé au charcutier qui sortait du tunnel. Lui et sa femme ont recommencé à faire du pâté et des saucisses ensemble ! Rien ne change ! Les vingt années de prime, nous allons les revivre à l’unisson, n’est-ce pas merveilleux ? »

    MH

    • Marlabis

      Mieux vaut en rire ! Le pauvre !

    • Photonanie

      Oh le cauchemar! Il vaut mieux ce contenter de ce qu’on a ou de ce qu’on est en se disant que ça pourrait être pire 😉

    • Séverine Baaziz

      Une histoire qui se lit avec beaucoup de plaisir. Rythmée, bien menée. Savant mélange de conte et de satire existentielle. Merci, marinadedhistoires !

    • Nour

      Ah ah ! Belle leçon cette histoire. La lucidité c’est d’avoir le courage de ne plus rêver, de ne plus attendre, d’aller chercher dès maintenant le changement qui sommeille en nous, du courage bon sang Luc !

      • marinadedhistoires

        Oui, tu as raison, c’est la morale qu’on devrait en tirer, merci pour ce commentaire, Nour.

    • Ulysse

      Très bien amenée cette histoire.

    • Laurence Délis

      Haha ! Mais quel cauchemar pour ce pauvre Luc !
      Merci, MH, ta chute m’a bien fait rire !

    • janickmm

      A la description fine et précise de Jeanne-Marie on plaint de tout coeur le pauvre Luc, et puis, le courage l’étreint, il tente, il ose, un moment on espère … le pire … (c’est honteux, de ma part !) et il pousse le bouchon à la sauver, a ben bravo ! Excellent !

      • marinadedhistoires

        Merci beaucoup pour ce commentaire précis Janick !

  9. Photonanie

    Ma participation se trouve ci-dessous et sur
    https://photonanie.com/2019/12/07/brick-a-book-352-%e2%9c%8d%f0%9f%8f%bb/

    J’aime les plantes, toutes les plantes. Fleuries ou non d’ailleurs. Tout ce qui est végétal me touche et on dit de moi que j’ai les doigts verts. Aussi quand on m’a proposé d’aller récupérer une ou l’autre plante dans l’orangerie du Jardin botanique devenue trop encombrée,  je n’ai pas hésité une seconde, je m’y suis précipitée. Arrivée sur place, j’ai été saisie par la majesté du lieu. Il avait dû en passer des plantes dans cet endroit, et pas que des plantes d’ailleurs mais aussi des invités prestigieux, ou pas, depuis sa création en 1819. Les grandes feuilles des  plantes créaient une atmosphère étonnante et un peu étouffante, voire même presque angoissante. Il faut dire que la chaleur et l’humidité était maintenues pour leur bien-être et la lumière avait bien du mal à traverser les feuillages touffus et les vitres sales.

    Je cherchais vainement à m’annoncer à la personne responsable de l’entretien de l’endroit mais j’eus beau crier « ouh ouh, y a quelqu’un? » plusieurs fois, seul le silence me répondit.

    Bizarre quand même, j’avais pourtant bien lu l’annonce invitant les personnes intéressées à venir sur place pour faire leur choix.

    Une affichette attira soudain mon regard au-dessus d’une longue table de rempotage: elle disait quand même bien que l’accueil avait lieu à partir de onze heures tous les…lundis.

    Et c’est là que la pièce est tombée! On n’était pas lundi mais vendredi et, dans ma précipitation, j’étais venue trop tôt… J’avais eu la même blague avec un article pour mon blog parti bien trop vite alors qu’il n’était pas même pas fini. Ah la distraction quand même

    Soit, je n’aurais pas de plante aujourd’hui mais je pouvais tout à loisir admirer toutes celles qui m’entouraient, lire leurs noms soigneusement calligraphiés sur de jolies étiquettes et même prendre quelques photos des plus particulières.

    Et au moins comme ça, quand je reviendrais le lundi, je saurais exactement celle que j’espérais rempoter..euh…emporter bien sûr 😉

    • LAURA

      Mon mari a laissé des plantes en pleine forme
      elles sont en train de dépérir… avec mes mains maudites

      • Photonanie

        Ah si je pouvais t’aider à les sauver…

    • Nour

      Petite histoire du quotidien presque…bon d’hein aujourd’hui n’oublies pas d’y retourner on est lundi !

      • Photonanie

        Oui, oui, j’y cours 🙂

    • Séverine Baaziz

      Ben contente de ne pas me savoir seule, frappée du sceau de l’étourderie. Et j’aime bien la fraîcheur de ton texte 😉

      • Photonanie

        Merci Séverine, pourtant je fais des efforts pour rester concentrée 😉

      • Photonanie

        Oh oui j’aime les plantes au désespoir de mon mari qui trouve que c’est parfois un peu encombré chez nous 😉

    • janickmm

      Pour les petits budgets, c’est parfait cette idée !

  10. Céline

    Bonjour, voici mon texte avant d’être prise dans les galères de grève de transports en commun. Bonne journée.

    Un pas après l’autre,
    Sortir de l’ombre pour atteindre la lumière…
    Ça parait si simple mais quand on revient de loin,
    que la vie vous a chahuté plus que de raison,
    ça ne l’est point.
    Avancer, rester dans le mouvement, garder un semblant de rythme…
    Et puis, entrapercevoir l’issue, la porte,…
    Jeter un œil de l’autre côté de la vitrine et voir le soleil à nouveau briller.

    • Marlabis

      Le mystère de ces portes… qui s’ouvrent sur nos espoirs, nos rêves, notre vie !

    • Séverine Baaziz

      Maginifique texte ! Plein d’espoir, un espoir sobre, mais bien réel, qui se dessine petit à petit. Bravo, Céline !

    • Photonanie

      Le soleil après la pluie de l’autre côté de la porte…l’espoir!

    • Nour

      Regarder devant ! c’est simple et difficile à la fois, devant car le passé est mort, il faut l’oublier et regarder maintenant ! Beau rendu en quelques lignes !

    • marinadedhistoires

      Un texte qui peut aussi bien s’appliquer à la vie en général qu’à cette période de grèves !

    • janickmm

      Ici, quelques lignes suffisent à faire comprendre que l’on est parfois très malmené par la vie, que l’on s’oublie, que l’on s’enferme, que l’on se replie, et puis un jour plus qu’un autre, la porte s’ouvrel, et il faut y aller, on fait le premier pas, on ose pour s’en sortir.

    • Kroum

      Les grèves sont terribles en France on dirait. Ton introduction amena ma lecture à t’imaginer bravant la foule dans un wagon de métro souterrain. Bravo Céline, c’est très beau ce descriptif jusqu’au moment de l’ouverture de la porte !

  11. Jen

    Bonjour et voici le mien,pas eu beaucoup de temps ce dimanche soir pour m’y mettre mais j’ai tenté de rebricoler ce matin avant le boulot. Bonne semaine!

    On s’y croirait
    Pourtant l’illusoire est à l’œuvre
    On développe des trésors d’ingéniosité pour faire semblant
    Semblant d’être
    De penser
    De croire
    De vivre

    On multiplie les installations, les parades
    pour espérer être ailleurs,
    Penser un lieu plus profitable
    Vivre une autre vie
    Croire à la possibilité d’une existence plus louée

    Que restera-t-il une fois tout éradiqué ?
    Respirer suffira-t-il, quand tout espoir aura disparu ?
    Pourra t on glaner un salut entre les interstices de la terre étouffée ?

    • Nour

      C’est marrant comme cette image rassemble quand même beaucoup de textes dans cette même thématique…Quelques mots pour aussi faire sentir ce besoin de détachement du passé…bravo !

      • Jen

        merci Nour! En effet parfois les thématiques se croisent pas mal. j’ai voulu évoquer un peu plus d’allégresse mais sur mes deux textes c’est celui que j’ai préféré.

        • Laurence Délis

          jen, j’avoue ne pas avoir ressenti l’allégresse de ton texte. Il m’évoque au contraire tout ce qui nous pèse et même le dernier paragraphe (superbe !) laisse une impression de peu d’espoir.
          Mais peut-être suis-je passée complètement à côté de ce que tu voulais dire…

          • Jen

            Laurence non en effet. Je disais que j avais ébaucher deux textes et que j aurais aimé poste le plus joyeux mais ce n était pas mon préféré…

    • janickmm

      Merci d’avoir bien bricolé, cela aurait été dommage de ne pas pouvoir lire ce texte, incisif, précis, précieux, lucide, merci à toi

    • Kroum

      Beaucoup de questionnements dans ton texte très lucide. Je te souhaite de trouver des réponses pour aller vers plus d’allégresse. Bravo pour cet écrit Jen!

  12. Laurence Délis

    La porte

    Soucieux de ne pas déranger les habitants, j’étais entré sans bruit dans la maison. Elle avait vieilli, les parements avaient perdu leur faste et elle portait nombre traces du temps qui passe. Avant d’en faire le tour, je voulais prendre le temps de me remémorer l’ambiance particulière dans laquelle nous avions baigné Jeanne et moi. On se retrouvait souvent les jours de pluie dans le large couloir qui menait au jardin et qui avait vu beaucoup de nos glissades finir en éclats de rire. Ce passage avait été un de nos terrains de jeu de prédilection et si je fermais les yeux, je pouvais encore entendre ces éclats emplis de gaité comme si la maison avait absorbé chacun d’entre eux. Bien sûr on ne s’approchait pas de la porte, Jeanne paniquait dès que je m’y aventurais trop près.

    Le lieu sentait toujours les essences d’arbres, les feuillages et la terre humide. Les plantes avaient considérablement poussé depuis mon départ car il se formait comme un toit végétal au-dessus de ma tête.
    Je crois que cela aurait plu à Jeanne. Elle rêvait de voyages dans des contrés sauvages, dans la jungle africaine ou dans les forêts amazoniennes. Elle devenait guerrière, chasseuse, exploratrice, découvreuse de terre nouvelle et m’entraînait sans trop de mal dans ces voyages au long cours. Quelquefois, à sa demande, on s’asseyait côte à côte sur le carrelage froid et, le dos appuyé contre le mur, je lisais à voix haute un roman pioché au hasard dans la grande bibliothèque. Les livres jaunis par le temps et imprégnés d’humidité exhalaient le parfum de ces vieux objets figés dans le temps et j’associe toujours cette odeur à ces moments de lecture. Assoiffée d’aventure, Jeanne se projetait dès les premières lignes dans ces récits de voyages. Elle me disait, « Tu verras, un jour, je partirais d’ici, je ferais le tour du monde et toi tu écriras mes mémoires ». Elle disait aussi, comme un avertissement « Ne cherche pas à ouvrir la porte qui mène au jardin, il faut préserver le mystère, refuser ce que l’on veut nous faire croire. Promets-le-moi, insistait-elle et j’acquiesçais d’un hochement de tête. J’étais prêt à beaucoup lui promettre pour ne pas voir l’inquiétude et la peine envahir ses traits.

    Jeanne n’est plus là à présent, elle est partie dès que je lui ai annoncé que je quittais la région pour poursuivre mes études. Ce jour-là elle n’a pas flanché, elle ne s’est pas retournée. « Ne regarde pas », m’a-t-elle dit. Mais je ne l’ai pas écoutée. Je l’ai vue ouvrir la porte et franchir le seuil qui menait au jardin. Il y avait foule et une sorte de banquet avait été installé. J’entendais comme des rires et des voix lui souhaiter la bienvenue. Le soleil paraissait se refléter de partout. J’avais du mal à garder les yeux ouverts tant la lumière absorbait tout, même la silhouette de Jeanne perdait consistance. Elle disparaissait de ma vue même si je devinais encore sa présence. La porte s’est refermée. Je me suis alors détourné et j’ai poursuivi ma propre route.

    Toutefois je n’oublie pas, et comme un souvenir que l’on chérit, je reviens chaque année à cette date anniversaire où elle a franchi la porte. Je ne sais pas si elle me voit, si elle sait qu’aujourd’hui elle hante les romans que j’écris. Je l’espère un peu. C’est une sorte d’hommage que je lui rends, en souvenir de tous ces jours partagés où elle m’apparaissait, esprit à l’aspect réel, auréolée de mystère.

    • Nour

      Encore une Jeanne, et un scénario bien ficelé – Jeanne, ça ne vaut pas le coup…revient !

    • marinadedhistoires

      Comme ton texte est mystérieux et envoutant, On a envie nous aussi de nous asseoir sur ce carrelage froid pour ressentir tout ce qui se passe dans ce lieu.

    • janickmm

      Cela me fait penser au film « jeux interdits », deux enfants qui s’aiment d’amitié et sont inséparables,même si un jour ils se séparent, l’amitié reste intacte, malgré la jolie part de mystère.

  13. LAURA

    Vu avec toi

    Ce décor ou paysage d ‘exposition
    A Montpellier peut- être.
    Il y a deux mois il y a un siècle
    Il y a une éternité[1].

    Une éternité
    Où j étais deux comme ces couples
    Je hais ces couples
    Qui me rappellent
    Que je suis seule[2].

    Vu avec toi

    • Séverine Baaziz

      Triste mais très beau ! J’aime le claquement un peu brut des phrases et l’intensité de ce qu’elles expriment. Bravo ! (Et courage, s’il t’en faut)

      • Nour

        On peux presque lire ces vers dans n’importe quel ordre que le sens du texte global n’en change pas…super.

    • janickmm

      Petites phrases cinglantes, qui se suivent et s’entrechoquent, lucides.

  14. les Caphys

    si j’osais, mais je ne me sens pas encore le courage de participer à ces défis là.
    Beaucoup de plumes de talent en tout cas

  15. Photonanie

    On sent poindre le désespoir de cette amputation d’une moitié…
    Tiens bon Laura!

  16. LAURA

    J’arrive à tenir
    à sourire
    mais pas à écrire gai

    • Marlabis

      Il n’y a aucune obligation à écrire gai ! Écrire est parfois salvateur… Il suffit de lâcher prise et d’accueillir ce qui vient !

  17. Catherine

    LOUISE

    J’étais sûre que c’était lui
    Même de dos…
    – Louise, on va au Jardin samedi ?
    Après l’hôpital on allait au Jardin d’acclimatation
    Pour chasser les images de son Pavillon
    C’était le numéro 7, celui de ma maman
    Elle y est restée assez longtemps
    Alors, pour me consoler, il m’emmenait gambader
    Au milieu des papillons dans la zone tropicale
    Quel festival !
    – Tu as vu ce morpho bleu qui vient d’Amérique centrale 
    Et l’œil du tigre et le page du roi ?
    J’en restais coi !
    Pff…J’entends encore le léger bruissement de leurs ailes
    J’étais émerveillée comme un soir de Noël
    Mais quand maman nous a quittés
    Il a disparu
    Je ne l’ai plus jamais revu
    – Papa ?
    – Maman, réveille-toi !

    • janickmm

      Un mauvais rêve ? un bruissement d’ailes de papillon … Une réalité cependant, la maladie et ces jolies balades dans un jardin magnifique.

  18. Ulysse

    « Les plantes ne sont-elles pas monstrueuses ? »
    Mon grand-père avait toujours eu l’art des phrases chocs. C’était une des nombreuses raisons pour lesquelles je l’aimais tant. Personnage lumineux, inattendu, il allait magnifiquement bien avec ses phrases. Il s’y connaissait en plantes aussi. Il avait travaillé dans cette serre toute sa vie comme jardinier. J’étais moi-même botaniste, et j’étais donc bien placé pour savoir qu’il n’avait pas complètement tort. Je lui répondis néanmoins.
    « Papi, tu ne peux pas dire ça. Tu offrais des fleurs à Mamie à chaque Saint-Valentin.
    − Les fleurs, petit, les fleurs… Tu le sais mieux que personne, les fleurs sont des sexes. Les sexes des plantes. »

    L’art des phrases chocs, vraiment.

    Nous faisions face à la grande porte de la serre, le jour tombait et la lumière blafarde de cette fin d’automne imprégnait le lieu, ainsi que moi-même, d’une humeur un peu lourde, qui contrastait étrangement avec les propos fantasques mais vrais de mon grand-père.

    C’était par lui que j’étais tombé dans la botanique, comme on tombe dans la marmite étant petit. Enfant, c’était fête dès que nous allions voir Papi, tant j’aimais son humeur joviale, cette espèce de relâchement qui se communiquait naturellement à tous ceux qui se trouvaient en sa compagnie, les touchant comme depuis l’intérieur.
    Et puis, déjà j’aimais ces phrases si pétillantes. Je les attendais, un peu aux aguets, et quand il en disait une, j’avais l’impression de cueillir une pomme. Si je n’avais pas école, j’essayais toujours de me débrouiller pour l’accompagner à la serre où il officiait. C’est là qu’il m’avait enseigné les rudiments de son amour des plantes. Sans leçon, sans discours : il ne faisait que me les nommer. Mais de le voir ainsi prendre soin d’elles, avec tant de précautions, d’attentions même, c’était comme si l’amour qu’il avait pour elles me rentrait par les pores de la peau.
    C’est triste, mais je dois dire que cet amour des plantes, chez moi, s’est un peu étiolé au fil des années. La botanique, de l’art classificatoire et passionné qu’elle était du temps de ses pionniers, est maintenant une science de la nature. J’aimerais que les plantes soient réellement monstrueuses, mais à vrai dire, je crains qu’elles ne soient devenues, via les progrès de la connaissance, qu’assemblages compliqués de legos moléculaires.

    Et pourtant ce soir, il me semblait que je la voyais, l’âme des plantes. Ou plutôt je voyais les plantes avec mon âme d’enfant. Était-ce la lumière ? Ces deux rangées de plantes bordant l’allée qui menaient à la porte de la serre, surplombée par les palmiers Phoenix theophrasti, ce soir, bouchaient la lumière, la pénétrant d’ombre et donnant à la scène un atour onirique. Je pensais au vers de ce poète, « Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant d’une femme inconnue, et que j’aime, et qui m’aime… »

    « Tu te souviens du nom du poète qui parlait d’un rêve étrange et pénétrant ?
    −Non. Je n’ai jamais beaucoup lu. De quoi parlait son rêve ?
    −D’une femme. Qu’il aimait, je crois.
    −Ah les femmes. Les femmes et les fleurs, on y revient toujours », fit-il en souriant.

    Nous avions quitté la serre, et nous étions dit au revoir.
    Ce fut la dernière fois. Peu après, Papi était mort. « Parti », comme on dit.
    Pour ma part, en hommage à ses phrases chocs, je dis qu’il fait de l’humus pour les plantes. Sur la tombe qu’il partage avec Mamie, j’ai déposé un bouquet de fleurs, et je les ai laissés.

    • Laurence Délis

      Beau texte, empreint de nostalgie et d’hommage.

    • janickmm

      Un héros ce grand-père, un exemple pour ce petit garçon, qui est reconnaissant, belle transmission

  19. marinadedhistoires

    Ton texte est vraiment magnifique et si ton héros aime les phrases pétillantes de son grand-père, nous, nous aimons aussi les tiennes, bravo, splendide et merveilleusement écrit.

  20. marinadedhistoires

    « ton narrateur » plutôt que « ton héros » devrais-je dire.

    • Ulysse

      Merci beaucoup Marina, ton retour me touche 🙂

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