Ce cliché était le seul qu’on avait d’elle ; et il fallait que je la retrouvasse.
La rue ne m’était pas inconnue, j’étais déjà passé devant l’immeuble avec sa fameuse rotonde, un soir, en repérage.
Personne ne m’avait remarqué. Je devais agir en sous-marin. J’y étais allé en me confondant dans la masse. Un pardessus gris, des bottes noires, et un chapeau enfoncé qui me cachait le visage.
Cette tenue m’avait sauvé car elle me cachait amplement. Sans elle, j’aurais tout de suite été découvert.
Les temps n’étaient pas vraiment propices pour ce genre de mission. Dans ce pays, des envahisseurs étaient arrivés, avaient mis leur drapeau à toutes les fenêtres. Une vilaine croix noire. J’avais cru au départ à une mauvaise plaisanterie, une blague de mauvais goût. Quel était ce pastiche de la svastika ? Les dirigeants qui avaient apposé cet emblème sur leur drapeau avaient-ils quelque chose à voir avec l’hindouïsme ? Extérieurement ils n’en avaient pas l’air.
Néanmoins ma mission n’était pas de comprendre le pourquoi du comment de ce drapeau-là. Non, je me devais de la retrouver.
Elle était l’élue.
Et le temps jouait contre nous.
Cette femme devait se cacher car Rodrigue n’avait pu me ramener que ce cliché flou.
J’avais ri au départ : comment allais-je pouvoir retrouver cette femme dont je ne connaissais que sa posture et de dos en plus !
Mais mon capitaine avait fait taire mon rire d’un claquement de langue. Ses yeux étaient froids, cernés, et sa bouche pincée.
– Notre survie dépend de ta mission. Cette femme que tu vois de dos est celle que nous cherchons depuis plus de trente ans. Là où elle est, elle se cache, elle n’est pas la bienvenue. Elle ne le sait pas encore mais elle est la clé de tout. Sans elle, notre civilisation s’éteindra. C’est l’élue, comme le disent les livres, c’est notre Sarah.
Mon sourire s’était figé sur mon visage, puis il s’était éteint de lui-même. Sarah : combien de fois avais-je pu lire ce nom dans le grand livre des Prophéties ? Le Livre disait donc vrai : un jour il nous faudrait une aide extérieure pour survivre. Les Anciens l’avaient écrit, et ce jour était arrivé.
Et forcément, c’était sur moi que cette mission tombait ! J’avais juste fini ma formation de Sage, obtenu mon diplôme avec les félicitations du comité, mais tout de même, pourquoi moi ?
La réponse de Rodrigue tint en un seul mot : potentialité.
Alors j’avais commencé mes recherches, avais d’abord fait des repérages dans cette rue, de nuit, espérant retrouver cette silhouette noire. Je ne pouvais approcher personne, j’étais différent des autres. Personne ne m’aurait aidé. Alors il avait fallu que je ruse.
Sur ce coup-là, je dois une fière chandelle à Virgile car il m’a été d’une aide précieuse en me fournissant ses dernières trouvailles : de minuscules pastilles qui se collaient n’importe où ; indécelables, elles me permettraient de voir tout ce qui se passerait dans cette rue sans y être. Si Sarah devait revenir, je ne pourrai pas la manquer !
J’avais donc parsemé le quartier de ces pastilles. De mon bureau, chaque matinée, j’ai alors commencé à visionner des heures et des heures d’enregistrement.
Jusqu’au jour où, j’ai entendu son nom. Ce n’était qu’un chuchotement.
Mon sang n’a fait qu’un tour, j’en serais presque tombé de ma chaise. Il fallait que je fasse vite. D’après eux, elle avait été emmenée dans les bureaux de la Wehrmacht. Elle devait croupir dans une pièce du sous-sol.
Que projetaient de faire ses ravisseurs ? Là encore, je perdais du temps avec mes réflexions idiotes.
Je pris alors mes affaires, sautant dans la première navette. Rodrigue était, comme à son habitude, derrière son bureau. Il sut quand il me vit que je l’avais retrouvée.
D’un simple mouvement de tête, il donna l’ordre aux autres soldats de se tenir prêts. L’invasion allait commencer. On allait extirper l’élue des griffes de ces pasticheurs de croix.
Une invasion de nuit, visages cachés. L’issue ne ferait aucun doute, nos armes, d’une technonlogie plus avancée étaient plus puissantes que les leurs. Nous avions juste quelques millénaires d’avance sur ces hommes qui s’appelaient entre eux des Terriens.
En revanche, j’avais davantage peur de la réaction de Sarah, quand, à son réveil, elle allait découvrir ses sauveurs. Nos visages n’étaient pas vraiment conformes à ceux des humains qu’elle avait connus …
©Leiloona
Et voici vos liens :
– Lola Valérie : La proie des ombres
– Antonio : Piège fatal à la manufacture
– Clara : Une vie et un sac
– Cécile MdL : La nuit, il fait trop noir
– Lilou : Mamie Ginette
– 32 Octobre : Agnès
– Lucie
– Zelda : Retrouvailles
– Julie Mallauran : Ensorcellement parisien
– Jean-Charles : La rue, mon angoisse
– Asphodèle : Décadence
bonjour,
je l’avais laissé sous la photo
je le redonne ici :
lien vers mon texte :
http://jetonslencre.blogspot.com/2012/02/une-photo-quelques-mots-28-agnes.html
voici mon lien !!
http://zeldaetloulou.wordpress.com/2012/02/13/retrouvailles/
belle semaine !
Le re voici : http://juliemallauran.wordpress.com/2012/02/13/ensorcellement-parisien/
Bonne journée, je m’attèle à la lecture ce soir
Je rajoute mon lien au cas où !
http://hisvelles.wordpress.com/2012/02/12/la-rue-mon-angoisse/
C’est étonnant de voir dans les différents textes que certains prennent le point de vue du suiveur, d’autres de la femme suivie !
http://0z.fr/YWUAp
étrange coïncidence de nos deux textes: dans les deux on cherche une femme alors que les deux univers sont totalement différent: puissance de suggestion d’une image assurément!
Beaux travail
Antonio
De mon côté, cette plongée vers un récit de SF s’est imposé à moi, mais je ne voulais pas laisser trop d’indices au début, juste laisser planer un petit doute.
Cette idée que j’ai finalement couchée sur le papier ne m’a pas quittée, et pourtant ce n’est pas mon domaine habituellement.
Mais l’esprit est le plus fort, et ce personnage voulait vraiment prendre vie. Alors je l’ai laissé faire !
Je me doute bien qu’il reste des couacs … que les aficionados du genre riront peut-être. Mais le plaisir d’écrire était là pour moi. C’est l’essentiel. (Et puis surtout, nous sommes tous limités dans le temps : une semaine, ça passe très vite finalement.)
J’ai normalement ajouté tous vos liens. Je n’ai pu lire vos textes qu’hier soir, pas eu accès au net le matin (et après, je ne peux me connecter au boulot.)
Merci à tous d’avoir participé : avec une dizaine de textes, c’est un très joli panorama de notre différentes inspirations !
http://leslecturesdasphodele.wordpress.com/2012/02/13/decadence
Aspho’ : parfois notre esprit nous emmène loin de nos terres, il est joueur !