Pour cette nouvelle photo, nous renouons avec les photographies de Fred Hedin, que vous pouvez aussi retrouver sur les réseaux et sur Instagram sur @fredhedinpictures. Je le remercie vivement de nous accorder le droit d’utiliser ses photographies ! N’oubliez pas le petit © !
A vos claviers !
Bonjour à tous ! Mon lien pour samedi https://leslecturesdantigone.wordpress.com/2023/01/21/latelier-decriture-n423-de-bricabook/
J’aime l’écriture du texte. L’environnement est vraiment bien décrit, avec ce contraste entre le papier à fleurs désuet et les murs blancs impersonnels. La phrase finale empêche toute désespérance.
Mais oui j’espère ! 😉
Merci encore!
Le titre est Retour et c’est planifié pour samedi matin 🙂
https://adrienne414873722.wordpress.com/2023/01/21/r-comme-retour-4/
Excellente idée bien traitée dans un format court. Bravo.
Le deracinement peut aussi être dans une autre rue ou un autre quartier. Ton texte montre très bien la douleur et la nostalgie. Bravo
bonjour
mon billet pour cette photo sera lisible ici
lundi matin
http://melimelojarjille.canalblog.com/
titre plus radin tu meurs!
nota samedi matin
Très drôle. Effectivement, il y a de la radinerie dans l’air, mais aussi de bons copains pas rancuniers…
excellent, on comprend bien le titre de ton texte à la fin, et il est drôle ton texte.
Ah oui ! Dans le genre radinerie to. Personnage se pose là ! Et la chute est amusante.
Je venais un peu machinalement sur le site ce matin et que vois-je ? L’atelier reprend ! Quel plaisir de vous retrouver ! Merci Alexandra de consacrer un peu de temps à ce rendez-vous hebdomadaire si agréable.
Oh, tu vois ? L’instinct t’a poussé à revenir par ici, et bim, l’atelier est bien là ! Je suis contente de te revoir par ici ! 🙂
Moi, j’ai un sérieux problème avec cette photo. Je croyais y consacrer un petit bout de matinée avant d’aller travailler mais l’heure tourne, les mots s’enchaînent et mon personnage a encore plein de choses à dire. Voilà qu’un autre vient de débarquer (d’où sort-il d’ailleurs, celui-là ?). Je vais être obligée d’aller bosser. Les laisser là, sans surveillance? Certes, ils ne risquent pas de me retourner la maison, dans son état, elle ne craint plus grand chose. Mais tout de même, je ne suis pas rassurée. M’attendront-ils? On peut demander un congé pour garde de personnages fictifs?
Hahaha ! Excellent !
Bonjour,
Voici mon texte https://chezcecilecfaitmaison.wordpress.com/2023/01/21/la-maison-atelier-dalexandra-k-2-2023/
Bon week-end
L’idée est bien traitée dans ce texte. La nostalgie contribue parfois à la prise de décisions. On attend la réponse de la soeur jumelle…
Merci ! Quelle bonne idée de faire une suite à ce texte ! Je vais y réfléchir
l’achat pour reconstituer son enfance, joli programme
Merci ! Bonne journée
Le nostalgie est particulièrement bien traitée dans ton texte, nous sommes plongés dans les souvenirs et la petite pirouette de fin me plaît bien.
Merci
Bonjour à tous,
voici le lien vers mon texte
https://palettedexpressions.wordpress.com/2023/01/21/sur-les-murs-tapisses-de-fleurs/
J’adore vraiment ton texte. Ce décalage, la force des mots, le côté destroy, mais passionné. Bravo.
Outch ! Quel texte ! As-tu lu Nous rêvions juste de liberté ? J’ai retrouvé la même intensité dans ton histoire
Non je ne connais pas le livre dont tu parles. (J’irai voir)
Mais la ref me touche. Merci Sophie !
Ton texte est puissant par l’évocation de l’ambiance du squat, on y est totalement. Et la petite touche de désespoir qui retourne le ventre.
Bonjour à tous
Bon week et bonnes lectures .
Bric a book 423 – 21 janvier 2023
N’importe qui aurait pris peur en rentrant dans cet appartement délabré. Pourtant quand l’assistante sociale, un peu gênée, a ouvert la porte de ce qui allait devenir notre chez nous, je lui aurais sauté au cou. Je sentais bien qu’elle avait un peu honte de me proposer le seul appartement qu’elle avait enfin réussi à me dénicher après des semaines de recherche. Mais pour moi c’était inespéré. Et quand en franchissant la porte, j’ai vu la lumière qui rentrait par les fenêtres, les fleurs sur les murs et cette vieille banderole de nouvelle année, j’ai tout de suite su qu’ici des gens avaient vécu heureux et qu’à mon tour je pourrai y être bien, qu’on pourrait y être bien. J’allais enfin pouvoir tourner la page et écrire la suite de notre histoire.
Après des années à faire semblant, des années à prendre des coups sans rien dire j’avais enfin osé parler. La naissance de notre fille a tout changé. Je devrais dire de ma fille car il ne sait même pas qu’elle existe, comme je l’ai ignoré moi-même avant le jour de sa naissance. Un matin d’hiver, je me suis réveillée toute mouillée et avec une douleur au ventre horrible. Il était déjà parti ou peut-être pas rentré de la nuit (je l’aurais su) mais en tous cas, j’étais seule. Je souffrais horriblement, des coups réguliers lancinaient mon bas ventre. J’ai quand même essayé d’aller au travail mais à l’arrêt de bus, j’ai fait un malaise et j‘ai perdu connaissance.
Je me suis réveillée à l’hôpital. Les infirmières m’ont expliqué que je venais de mettre au monde une petite poupée de 3 kilos 240, qu’on avait été obligé de me faire une césarienne car je ne réagissais plus mais que tout s’était bien passé et que ma petite fille était en forme. Je ne comprenais rien, je leur ai dit que ce n’était pas possible que ce n’était pas moi que je n’étais pas enceinte, qu’elles devaient confondre. La sage-femme est intervenue et m’a expliqué que j’avais fait un déni de grossesse, que cela arrivait parfois mais qu’on allait m’accompagner. Je me suis alors mise à trembler, à suffoquer… J’étais maman. Il était donc papa. La chose que j’avais tant redouté était arrivée. Tant qu’il n’y avait que moi, tant que les mots et les coups n’étaient destinés qu’à moi, j’arrivais à supporter, j’arrivais même parfois à accepter et il m’est même arrivé de lui pardonner. Mais imaginer qu’il puisse toucher à mon bébé, qu’il puisse hurler dans ses petites oreilles, qu’il puisse la traumatiser et en faire sa chose comme il l’avait fait avec moi m’était insoutenable. C’était juste impossible.
« Je ne veux pas !! Je ne peux pas !!! Il va la tuer !!!! Gardez-la ! Donner-la ! »
Mes mots ont déclenché l’intervention du service psychologique. On a commencé par me calmer avec un sédatif. A mon réveil, on m’a proposé de voir ma fille ce que j’ai d’abord refusé. Puis j’ai rencontré une psychologue. Et pour la première fois, j’ai tout raconté : les rabaissements, les injures, les coups, les viols…Et on m’a écoutée, sans me juger.
Depuis ce jour, les services sociaux se sont occupés de moi, de ma fille, de nous. Les premiers jours ont été très durs. J’avais du mal à accepter qu’elle soit ma fille et surtout qu’elle soit sa fille. Malgré sa fragilité, quelque chose en elle me répugnait dès que je posais les yeux sur elle. J’en avais honte, ça me faisait mal. Mais j’ai appris à l’aimer ma petite Eve, grâce aux infirmières, aux psychologues, aux éducateurs. On m’a promis qu’Il n’aurait pas connaissance de la naissance de ma fille et que tout serait mis en place pour qu’Il n’ait plus le droit de m’approcher. On nous a logé un certain temps dans un centre d’accueil pour filles-mères en attendant qu’on nous trouve un appartement.
Et le voilà !
N’as-tu pas eu du mal à quitter ce personnage? Moi, je l’aurais bien suivi un peu plus longtemps. Je l’ai déjà prise en affection, cette jeune femme. Il faut dire que tu exprimes très bien la complexité de ses sentiments, ses espoirs, la force que lui donne cette naissance, les peurs et les doutes. Bravo. Ton texte est très émouvant.
Merci beaucoup Sophie. Il est vrai que je l’aurais bien tenu un peu la main mais peut-être reviendra-t-elle sur un autre cliché…
ouf! bravo!!
Le récit foisonne de détails, s’éloigne de la photo pour y revenir et lui donner une forte raison d’exister 🙂
Bravo
Outch Valérie ! Ton texte ne peut pas laisser indifférent.
Quelle émotion à la lecture de ce texte! Partir de cette photo pour arriver à un déni de grossesse, c’est fort, très fort! Bravo pour ce récit.
Ton texte est poignant, écrit justement. On reste ému un moment après sa lecture. Bravo et merci d’avoir su communiquer cette forte émotion.
il est émouvant ton texte sur cette femme, qui a peur, qui s’attache peu à peu à sa fille. La chute par contre est glaçante, espérons qu’elle s’en sorte.
Waw … le texte embarque, c’est sans fausse note, tout sonne juste. Merci. C’est incroyablement fort dans la psychologie du personnage. Merci.
Quel texte, ma Val ! Forcément, la fin va vite ! Il y a de quoi nous faire un roman complet, là. Merci pour ces émotions
Quel texte…bravo !
Bonjour à tous,
Je vous remercie pour vos lectures de la semaine dernière. Je découvre le plaisir de faire autre chose de ce que j’écris que le ranger dans un dossier de mon ordi. Cette semaine, je me suis laissée surprendre par l’envie de poursuivre cette histoire. Comme je ne veux pas encombrer longuement les commentaires, je vous livre son début. Je vais me donner le temps de la dérouler un peu plus pour voir ce qui en sort :
Encombrants
« Vous avez atteint votre destination. » Ce fichu GPS avait dû perdre le signal. Je ne voyais rien alentour que des friches et un chantier. Ici s’étendrait bientôt un complexe immobilier de 230 logements hyperconnectés. Le paradis à portée de clics pour jeunes actifs utiles à la Nation. Dans l’immédiat, la faune locale se résumait à deux grues indifférentes peu enclines à me renseigner. Un coup d’œil sur ma montre confirma mes craintes : 18h45, rien à espérer de ce côté-là non plus. Les ouvriers étaient rentrés chez eux depuis longtemps. Ce que j’aurais pu faire moi-même, d’ailleurs, si la journée n’avait été si calme. Mais avec seulement 60 heures de rentabilité effective le mois dernier, je ne pouvais me permettre de bouder une mission supplémentaire. Encore une semaine à ce rythme-là, et je risquais le retraitement anticipé.
Du haut de la palissade, un corbeau toisait ma benne aux trois quarts vide et son maigre butin. Deux lave-linges, un sommier défoncé, quelques cartons de carrelage antidérapant et une commode vermoulue, voilà tout ce que m’avait rapporté une journée de collecte à domicile. Le reste avait fini à la déchetterie. Je garai la camionnette sur le bas-côté pour vérifier l’adresse. « Augustin Bérard, Chemin des trois ruisseaux ». L’ordre d’enlèvement émis par le Ministère ne m’apprenait rien de plus.
Mon bordereau à la main, je claquai la portière en maudissant ce boulot qui me permettait tout juste de conserver ma place dans la société. Les croassements indignés du volatile sonnèrent comme une insulte. Mon stationnement dérangeait le maître des lieux. Il semblait me défier. Je choisis de l’ignorer. De l’autre côté de la route, un monticule de terre recouvert de végétation me bouchait partiellement la vue. Je traversai la départementale déserte. Seul le bourdonnement d’un insecte brisait le silence miraculeux de cette fin de journée. Contournant un talus que les coquelicots disputaient aux marguerites, je me frayais un passage entre des ronciers sur ce qui semblait avoir été une allée. Je m’étonnais qu’un tel espace eût échappé à l’appétit des promoteurs dans cette région où le moindre mètre carré était scrupuleusement exploité, rationnalisé, valorisé. Bastion sauvage en sursis, coincé entre deux villes fonctionnelles et dynamiques, ce terrain sans usage m’émouvait. Comme les miennes, ses heures étaient comptées. Un prochain plan d’aménagement du territoire le rayerait de la carte.
Je m’y engageai dans un nuage des papillons. Mes lourdes chaussures de sécurité chassèrent une musaraigne. Je soupçonnais un canular. Qui donc aurait pu solliciter mes services dans ce lieu à l’abandon ? Ici, une boîte aux lettres plantée de guingois, grignotée par la rouille et le liseron, là un vieux portail éventré. Il y avait bien une maison, envahie par le lierre que vomissaient ses volets mal fermés. Mais elle était manifestement inhabitée depuis des années.
S’il était évident que je ne sauverais pas ma journée dans cette ruine, une excitation diffuse m’empêchait de tourner les talons. J’oubliai ma lassitude. Je me sentais comme un enfant aventureux explorant un terrain vague comme une île au trésor. Au milieu des herbes folles gisaient quatre chaises de jardin autrefois blanches, orphelines de table et de parasol que je redressai une à une, les alignant contre le mur en moellon. Je posai la main sur la façade lépreuse. Son cœur battait encore. Quels rêves avait-elle absorbé ? De combien de chagrins s’était-elle gonflée ? Je m’assis un instant sur le banc de pierre pour surveiller un souvenir de balançoire dont pendaient encore les cordes. Sur une impulsion, je m’avançai jusqu’à la porte d’entrée qu’un coup de pied suffit à ouvrir. Une incompréhensible pudeur me cloua sur le seuil. Je regrettais déjà mon geste comme une profanation. Je me raisonnai et j’entrai. Après tout, je ne faisais rien de mal. Avec un brin de mauvaise foi, j’aurais même pu invoquer un reste de conscience professionnelle. Progressivement, mes yeux s’habituaient à l’obscurité. Je distinguai un radiateur en fonte, un évier dans lequel s’empilaient quelques verres. Je fus tenté d’en retourner un. Quel âge avais-je au fond ? J’osai un pas de plus et butai dans le pied métallique d’une table en formica. J’en caressai le plateau qui gondolait. Mes doigts se couvrirent de poussière.
La maison n’était pas grande mais les pièces résonnaient du vide qu’elles abritaient. Une raie de lumière filtrait à travers une porte entrouverte. J’y vis une invitation à poursuivre la visite. Quand je poussai le battant, les gonds grincèrent doucement. Une glycine vigoureuse, déversait ses grappes mauves par la fenêtre dont elle avait brisé les vitres. Le chat tigré qui avait élu domicile sur le matelas hors d’âge s’enfuit à mon approche, fila entre mes jambes et se nicha sur un tas de chiffons, dans le coin le plus obscur d’une troisième pièce.
– Tu viens pour les encombrants, sans doute.
Une voix chevrotante me fit sursauter. Ce que j’avais pris pour des couvertures miteuses, maintenant que j’y regardais mieux, avait vaguement l’allure d’une silhouette. Sidéré, je ne songeai pas à reculer. La forme inerte remua dans une plainte, délogeant le chat qui miaula sa désapprobation. Je reconnus une manière de visage. Toute momifiée, la chose était humaine, vivante encore, quoi qu’à peine. Depuis quand n’avais-je pas vu un vieillard ? Le décret instaurant la date limite de citoyenneté remontait à 25 ans. Pourquoi ne l’avait-on pas retraité, celui-là ? Il fallait que cela tombe sur moi ! Les frigos, les canapés, les pianos désaccordés, les morts même, je savais gérer. J’étais formé pour. Mais les vieux…il y avait bien longtemps qu’on n’en ramassait plus.
Quand le Grand Plan de Renouveau National était entré en vigueur, il avait fallu affréter des flottes de camions par centaines pour déplacer les inaptes. Les familles avaient d’abord résisté alors on avait fait intervenir l’armée. Le coût social de la retraite était faramineux, on avait adopté le retraitement, solution économiquement plus viable. On s’était peu à peu fait à l’idée. Pour la santé du corps civique, on avait pris l’habitude d’en amputer ces membres gangrénés. Les mentalités avaient évolué. Certains vieux étaient parvenus à se cacher, dans les premiers temps. Mais privés des largesses de l’Etat providence, la plupart, faute de parvenir à se nourrir, s’étaient rendus d’eux-mêmes. Les autres avaient été dénoncés par leurs voisins. Pour grand-père, c’est l’odeur qui avait alerté la concierge. C’est vrai que ça sent, un vieux. Ça sent l’avenir rabougri, la vie mal aérée, l’espoir qui s’étiole et les rêves croupis. Ça sent la joue blette qui n’a plus guère l’occasion de piquer aucun baiser d’enfant. Ça sent la fin. C’est une odeur fourbe qui s’insinue, jaunit les rideaux et gonfle les jointures. Tous les manuels vous le disaient. Bizarrement, celui-là ne sentait pas trop.
« N’aie pas peur, tu es à la bonne adresse. Je t’attendais. » La bouche édentée se tordit dans une grimace qui voulait être un sourire. C’est du moins ce que la malice de ses yeux laissait entendre. Son visage parcheminé, embroussaillé de sourcils ne parvenait pas à me dégoûter tout à fait. Et il m’intriguait. De quoi avait-il bien pu vivre, tout ce temps ? Je n’osais trop lui parler. Était-ce même légal de communiquer avec un DLCD?
– Allons mon petit gars, faut te remuer. Tu procèdes à l’enlèvement ou tu prends racine ? »
Sa voix, s’éclaircissait mot après mot, comme si elle s’éveillait d’un long sommeil.
– Bon sang, t’es jeune mais qu’est-ce que t’es lent. Tu t’occupes bien de collecte d’encombrants à domicile ?
Je parvins à hocher la tête.
– Tu vois, quand tu veux. On avance. Je suis un vieux truc, tu débarrasses les vieux trucs. On est fait pour s’entendre. Tu t’organises comment pour me sortir d’ici ? T’as un diable ? Un monte-charge ? Parce que je te préviens, y’a longtemps que mes vieilles guibolles ne me portent plus.
A mesure qu’il parlait, son buste se redressait et ses joues se coloraient d’une vie neuve.
– Monsieur, je fais les meubles, moi, pas les gens
– Augustin, appelle-moi Augustin, m’interrompit vivement le vieil homme. Les meubles, les gens, qu’est-ce que ça change ? Je te promets d’être sage comme un guéridon. Alors, on y va ?
– C’est que j’ai pas envie d’avoir d’ennuis, moi, je connais pas trop la procédure, pour les DLCD.
– Décédé ? Dis donc, gamin, tu y vas un peu fort quand même. Je ne suis plus un jeune homme vigoureux, je te l’accorde, mais je ne suis pas encore mort.
Le malentendu m’arracha un rictus.
– DLCD, Monsieur Augustin, Date limite de citoyenneté dépassée.
Le bonhomme me regarda un court instant sans réagir. Soudain, il éclata d’un rire tonitruant. Jamais je n’aurais imaginé qu’un tel bruit pût sortir de ce corps frêle sans le briser.
– Va pour le yaourt moisi !
*****
Je ne résiste pas plus longtemps à l’envie d’aller lire ce que vous avez fait de cette photo inspirante.
Brrr ! Ton récit fort réaliste fait froid dans le dos et m’a (un peu) rappelé le film « Soleil vert »
Bravo pour ton flair… J’avais en effet un petit bout de Soleil vert pas bien digéré qui me restait sur l’estomac.
Beaucoup de mélancolie se dégage de ton texte.
Il y avait près de chez moi, une petite maison, comme une île, coincée entre deux chantiers. Je passais souvent à vélo devant, elle semblait inhabitée, mais les aboiements du gros chien, invariablement dans le jardin, juraient du contraire. J’imaginais un petit vieux à l’intérieur. Et puis, après les vacances, quand je suis revenue, plus de trace ni de la maison ni du chien… Que sont-ils devenus? La question me rend en effet un peu mélancolique.
Un récit d’anticipation qui me plombe un peu le moral pour l’avenir de mes enfants et petits-enfants…
On a souvent vu des films incroyables dont l’action devenait réelle un paquet d’années plus tard.
Un régal de récit. Dérangeant, certes, mais vraiment bien mené. Une belle imagination : bravo.
flippant mais en même temps crédible dans un monde obsédé par la rentabilité et le travail. Bravo pour l’ambiance qui passe plutôt du bucolique au début et le côte enfantin de la découverte de la maison, à un côte plus noir de cette société sans âme.
Ha génial ! J’aime beaucoup ce texte, parce qu’il nous fait passer par l’esthétique des ruines (nous aimons cela, n’est-ce pas ! :-p), puis par un récit futuriste glaçant, sans lâcher le ton humoristique. Un texte riche !
(Je suis heureuse de te voir par ici, et déjà mordue par cet atelier ! 😀 )
excellent texte! qui rend bien une sorte de peur que nous ressentons tous, dans notre société, sur l’avenir qu’elle réserve à ses vieux qui coûtent sans être productifs…
J’adore. La description des lieux fourmille de détails et nous plonge dans une atmosphère à la fois bucolique et grave. Le personnage principal est assez touchant et ton idée des DLCD bien que futuriste m’a bien amusée. J’ai bien aimé aussi le passage sur l’odeur des vieux… Merci.
Canon et glaçant à souhait ! Le côté anticipation est hyper réussi !
Merci Stephie ! C’est un genre que j’aime beaucoup lire mais je ne m’y étais jamais essayé et cette tentative me donne envie de creuser.
Emile s’accouda à la balustrade. L’engin de chantier dévorait à grands coups de dents les pans de mur du petit immeuble en démolition. La poussière l’incommodait, certes, mais depuis une décennie qu’il attendait ce moment, il pouvait quand même supporter cet inconfort inévitable et passager. Les mâchoires du broyeur semblait lui rappeler des films fantastiques qu’il aimait, malgré son grand âge, regarder à la télé le soir sur son canapé. Le grand moment arriva. Le bulldozer arracha les morceaux du deuxième étage, laissant apparaître un papier peint fleuri comme c’était tant la mode autrefois, à la période où il avait emménagé avec Marie. C’était chez eux, leur appartement, leur maison. Marie était morte le 21 mars 1976, un premier matin de printemps. Puis, il y a dix ans, Emile avait été exproprié et avait dû précipitamment quitter son logement. Le nuage produit par la chute de façade le fit tousser. Il attribua les larmes qui se formaient au coin de yeux aux particules qui s’éparpillaient un peu partout. Il attarda son regard sur le décor vétuste de son petit deux pièces ouvert ainsi sur le vide. Il avait la cruelle impression que son intimité qu’il avait toujours cherché à préserver s’étalait devant la ville entière. Le coup suivant donna le coup de grâce dans un amas de pierres.
L’engin destructeur arrêta son moteur. Les ouvriers commencèrent à déblayer. Emile en interpella un : « Monsieur, monsieur ! Vous pouvez me donner le morceau de tissu qui dépasse des pierres, là ? ». L’homme souleva légèrement son casque, afficha un petit air moqueur et ramassa une sorte de chiffon enchevêtré dans les briques. « Voilà, papy, mais ne restez pas là, ce n’est pas bon pour vos poumons ! ». Emile dit un vague merci, secoua le tissu, l’essuya sur son pantalon. Il s’agissait d’une longue bande découpée destinée à être accrochée par une ficelle. Le temps en avait usé l’apparence et cette démolition l’avait un peu altérée, mais on pouvait quand même y lire nettement sur les lettres découpées aux ciseaux : « Bonne année Marie ! Je t’aime ! ».
Emile repartit lentement, appuyé sur sa canne.
« Quand on n’a pas de tête, il faut des jambes. Quand je pense que dans tout le fourbi du déménagement il y a dix ans, j’avais oublié de le récupérer… »
Génial, encourageant! on peut poursuivre nos recherches! merci
Ton histoire m’a embarquée. Elle m’a à la fois serré le cœur et réconfortée. J’ai senti très fort la nostalgie de ton personnage. J’ai pris beaucoup de plaisir à la lire. Je suis un peu frustrée d’ailleurs… j’en aurais bien lu davantage.
la chute est délicieuse et contrecarre la nostalgie qui aurait pu naitre de la situation ! Bien vu !
On a peine pour ce lieu pour le coup.
Une histoire qui finit plutôt bien, j’aime.
j’ai bien aimé la chute qui contrebalance la fin d’une époque et les souvenirs, et le fait qu’il est fait tout ce chemin pour récupérer la banderole.
Les objets qui annihilent le temps et nous permettent de vivre de nouveau avec une force souvent étonnante l’événement en question. Beaucoup aimé cette nostalgie du temps qui passe. <3
Une difficile mise à nue à coups de pelleteuse mais la chute ramène le sourire. On imagine bien le petit papy tout souriant repartir avec sa banderole, mémoire de beaux souvenirs avec sa petite Marie. Merci à toi.
Il m’a beaucoup touchée, ton personnage 😉
Bonne année, qu’il a dit, bonne année et il est parti
En quelle année déjà ?Oh ! Ça remonte à..loin, les années 60 du temps des papiers peints à fleurs, à grosses fleurs
des bleues, des rouges, on choisissait la couleur alors, pas le gris, le taupe, y a que la télé qui était en noir et blanc. Les murs étaient recouverts de « tapisserie » cela changeait de la peinture crème qu’on appliquait partout.
Nous avions passé le réveillon chez lui, à Issy les Moulineaux, dans une de ces maisons construites dans les années 30 par les arméniens rescapés des massacres. Ils étaient étranges ces gens là, leurs maisons ressemblaient à des entrepôts en béton, toit plat, une sorte de cube bien carré avec un garage pour la voiture qu’ils achèteraient un jour ! Ils en étaient sûrs, ils l’auraient cette voiture !
Ils étaient disséminés au sud de Paris, Issy et Clamart, louaient leurs maisons à d’autres immigrés, des italiens, des russes qu’ils faisaient parfois travailler sur leurs chantiers.Il avait justement été employé et logé par l’un d’entre eux, photographié avec toute l’équipe lors de la construction du Palais de Chaillot.
Cela devait parler un drôle de français la haut, une sorte de sabir, ils baragouinaient ( du breton bara : pain et gwin : vin!!) sec ! Combien de nationalités sur ce toit… plat !
Quand il a disparu, trente ans plus tard, personne n’a plus jamais entendu parler de lui
il est sorti acheter des cigarettes
il avait les allumettes
il a tout laissé en plan
son travail
ses potes
sa famille
n’a même pas fermé la porte
l’arménien n’a pas reloué son appart
trop de frais
le hasard ! c’est moi qui suis revenu pour évaluer la bâtisse, la faire démolir et libérer le terrain pour le futur, alors que là c’est mon passé qui m’explose le crâne, brise le peu de certitudes et de confort que j’avais réussir à ériger , ma vie à refaire, un éternel recommencement !
Bonne année, il avait dit !
Un lieu pas anodin encore une fois ,et qui fait remonter des souvenirs percutants.
Un lieu qui suscite bien des souvenirs…Le hasard est parfois tellement facétieux!
Joli texte mélancolique. Il est des rencontres comme celle là, marquantes et qui s’achèvent sur un mystère. L’imagination peut parfois écrire la suite.
texte étonnant comme quoi les lieux sont toujours associés à la mémoire et pourtant ils disparaissent aussi.
Toujours étrange ces disparitions…
Texte qui installe tout un monde et laisse planer le mystère. J’aime quand les souvenirs s’extirpent des lieux. Merci pour le partage
Bonjour à toutes et tous.
Ma participation se trouve sur https://photonanie.com/2023/01/21/brick-a-book-423/
A samedi prochain.
C’est vrai que la banderole ajoute une présence humaine dans ce monde minéral. L’idée est bonne d’avoir saisi cet angle.
Merci Kloud
Bonjour à tous, un petit texte sur cette photo, bonne lecture et bon samedi
http://eirenamg.canalblog.com/archives/2023/01/21/39787154.html
Bonne idée de point de vue. Et l’appréhension de l’appartement qui attend son futur occupant est convaincante.
merci pour une fois j’avais envie de ne pas être un humain. Bon samedi
Vraiment intéressant ! Le témoignage des pierres, une idée qui me touche ! Nous sommes si peu de choses à l’échelle de l’histoire de l’humanité… quant à celle de la planète…je me sentie en empathie avec un mur ! C’est fort. Tu réussis à adopter ce point de vue original sans que cela paraisse artificiel. J’avais aimé l’idée dans S’adapter, mais cette narration par les pierres m’avait tout de même semblé un peu gadget. J’aime beaucoup ce que tu en fais ici.
merci Sophie
Bonsoir. Voici mon texte. Belle lecture et bonne soirée.
La quête était rude
Et les déconvenues fréquentes.
Trop petit, pas assez lumineux,
Pièce manquante…
Il fallait garder
Le moral bien accroché,
Élargir le quartier de recherche,
Et accepter quelques concessions.
Un premier chez-soi,
Un nid à construire à deux,
Voire un plus grand à trois,
Il faut bien la perle rare.
Alors, malgré un soupir,
En poussant cette énième porte,
Dévoilant cette banderole décatie
Ils se dirent : pourquoi pas ?
Oui pourquoi pas…
A deux, c’est ouvrir les possibles même dans la précarité.
C’est souvent plus facile à plusieurs en effet
Un texte d’espoir malgré tout, le début d’une histoire à 2 puis 3 puis…
Merci
Sans doute quelques concessions dans ce choix mais avec quelques travaux et beaucoup d’amour ils en feront sans aucun doute leur perle rare.
Tout à fait même s’il n’est pas toujours évident de voir la beauté derrière les lambris
Très chouette et mélodieux 😉
Merci beaucoup
Le texte aurait dû être publié hier. Je voulais écrire. Rien ne sortait, puis la journée m’a embarquée. Ce matin, encore, rien ne venait, pas d’idée. Et puis d’un coup, d’un trait. Je vous livre sans doute le texte le plus faux et pourtant le plus vrai que j’aie jamais écrit. La dernière crise…
https://www.milleetunefrasques.fr/derniere-crise/
Je te réponds là, je n’ai pas l’impression que mes commentaires s’affichent.
La chute de ton texte est terrible… sacrée plaie que celle-ci.
Oui et l’écriture permet de les panser… encore… alors qu’on les croyait cicatrisées 😉
Douloureuse maladie que celle-là…tellement difficile à guérir.
Oui, elle détruit les malades et leurs proches
Une chute fracassante en effet…
Bonjour Leiloona, Voici mon texte: https://floconsdebonheur.wordpress.com/2023/01/22/sous-lepiderme/
J’ai essayé par 2 fois de copier coller mon texte en commentaire mais sans succès…
Un bruit de bouchon qui saute. Des rires d’enfants. Une bonne odeur de gigot qui sort de la cuisine. Des feux d’artifices qui embrasent le ciel. L’espoir d’une nouvelle année de joie et d’amour.
Un éclair plus fort que les autres. Puis un autre. Puis des dizaines qui passent au-dessus de l’immeuble dans une gerbe d’étincelles. Le souvenir des films en noir et blanc quand Staline faisait jouer ses orgues.
Un orage dans le quartier d’à-côté qui marque les points d’impacts. Les enfants cachés sous la table de la salle à manger. Mamie qui pleure dans un coin. Des parents soulagés que ce ne soit pas pour eux et font bonne figure.
Les sirènes qui hurlent quand l’alerte est passée. Les ambulances qui fendent la fumée. La lumière qui ne revient pas. Le fumet du gigot submergée l’odeur âcre de l’incendie. Le champagne répandu par terre.
Le cône blafard de la lampe torche qui tente de rassurer. Les enfants un peu moins terrorisés. Mamie qui pleure toujours, en silence. Les éclats de la porte des toilettes au milieu du couloir. Le regard des parents terrifiés qui réalisent que papi n’est pas là. La ruée vers le bout du couloir. Le mur de l’immeuble pulvérisé par une roquette tombée dans la cour. Papi crucifié sur la cuvette des toilettes.
La tentative dérisoire de cacher la scène aux enfants. La lumière qui revient. Le désastre maintenant bien visible. L’impuissance face à ce corps inerte. La nécessité de faire très vite un trou au pied de l’immeuble. L’obligation de partir au plus vite.
Les valises faites en un quart d’heure. Les papiers rassemblés. Le chat libéré qui arrivera bien à se sauver lui-même. La voiture remplie jusqu’au toit. Le voyage fait d’arrêts sous les ponts pour échapper aux bombardements. Le slalom entre les carcasses de véhicules militaires. Les cadavres que l’on évite et qu’au bout d’un moment on ne voit presque plus.
Le poste frontière enfin en vue. La voiture qu’il faut laisser de ce côté. Les derniers pas vers la sécurité. Les humanitaires débordés qui font ce qu’ils peuvent. L’autre côté, enfin. L’espoir qu’ils savent vain de faire un jour le chemin du retour. Une nouvelle vie qu’ils ne voulaient pas qui commence.
Des semaines. Des mois. Des années. Une vie d’errance dans un pays qu’on ne connait pas. Une langue difficile à maîtriser. Des méandres administratifs labyrinthiques. Une mamie enterrée dans un cimetière anonyme. Le regard méfiant des autochtones. Heureusement quelques-uns tendent la main
Un jour des papiers. Un autre un travail. Bien plus tard une clé d’appartement. Des enfants joyeux mais qui ne font que survivre.
Une soirée de réveillon qui devait marquer un nouveau départ, mais pas celui-là.
Ouch! Dur, dur Terjit! Et malheureusement une actualité brûlante pour certains…Une atmosphère d’horreur bien rendue…
Déchirant et peut-être bien le récit qui colle le mieux à l’atmosphère de la photo…
Contente de te lire 🙂
J’étais de bonne humeur, moi, ce matin !Ce texte est déchirant !